Leurs guerres ne sont pas les nôtres
Depuis son arrivée au pouvoir en janvier, Trump a donné un coup d’accélérateur à la guerre commerciale mondiale. Cette compétition économique existe depuis toujours, menée essentiellement par les États-Unis et les pays européens, qui sont en lutte pour se partager le monde depuis plus d’un siècle. Une lutte qui se menait de façon plus feutrée, en tout cas entre « alliés », car pour les pays dominés par ces grands empires économiques, c’est l’exploitation la plus rude qui règne.
Trump a enchaîné les provocations : annexer le Canada et le Groenland ou chasser les Palestiniens de Gaza pour en faire une nouvelle Côte d’Azur, prendre le contrôle de l’économie ukrainienne. Et chaque jour qui passe, il promet une nouvelle guerre commerciale à coups de droits de douane de 25 % contre le Canada, le Mexique, l’Europe et plus récemment contre tout pays qui achèterait son pétrole au Vénézuéla. Dans la plupart des cas, ces taxes n’ont duré qu’un jour, la chute des cours des bourses obligeant Trump à reculer avec une discrétion peu habituelle pour le personnage.
Les provocations de Trump ont fait dire qu’il était stupide ou fou. Certes, les changements subits et imprévisibles de sa politique tarifaire peuvent donner une impression de chaos qui tranche avec le ronron diplomatique qui prévalait dans les relations des États-Unis avec leur alliés pendant les années précédentes. En réalité, Trump n’est pas fou. Il rappelle simplement au reste du monde que les plus forts, ce sont les États-Unis. Trump travaille pour eux, pour que ce soit eux qui récupèrent le plus gros des marchés militaires, des ressources ukrainiennes ; il travaille à mettre à genoux leurs concurrents européens et chinois. La preuve : tandis que les dirigeants européens gesticulent, impuissants, les grands patrons américains se taisent, et se préparent à encaisser le gros lot.
Pourtant, les taxes posent autant de problèmes aux capitalistes américains qu’elles en résolvent. Elles handicapent les entreprises américaines, comme General Motors, qui sont installées au Mexique, et les milliers d’autres qui travaillent avec des sous-traitants basés au Mexique ou au Canada et dont les pièces font parfois plusieurs allers-retours de part et d’autre de la frontière.
La même interdépendance existe entre les États-Unis, la Chine et l’Union européenne. Musk, qui possède une usine Tesla à Shanghaï et y vend le tiers de ses voitures, n’a pas du tout envie de se fâcher avec Pékin. Et même si Boeing, rival d’Airbus, peut avoir intérêt à la promotion du patriotisme économique, il achète des moteurs en Europe.
Dans l’enchevêtrement de l’économie mondiale, faire croire que chaque pays peut être souverain économiquement est pur mensonge et démagogie.
C’est là la contradiction dans laquelle se débat le capitalisme depuis cent ans : l’économie est devenue mondiale, les capitalistes développent leurs tentacules sur toute la planète mais la concurrence entre eux les pousse dans des crises qui referment les frontières.
Partout, les tensions montent du fait de la guerre économique toujours plus féroce. La lutte pour la suprématie sur telle ou telle région et la guerre pour les minerais, le pétrole, l’énergie ou les marchés font rage. La concurrence entre rapaces plonge depuis longtemps des régions entières dans des guerres sanglantes, et pas qu’en Ukraine. La République démocratique du Congo, le Soudan et le Moyen-Orient sont aussi ravagés par des guerres alimentées par les appétits et les manœuvres des grandes puissances.
Alors oui, la situation est grave. Poutine a déclenché une boucherie en Ukraine pour contrer la pression occidentale et protéger les intérêts des oligarques russes. C’est un dictateur et un assassin. Mais les dirigeants occidentaux, qui ont attisé cette guerre pour défendre leurs propres intérêts impérialistes, ne sont pas moins rapaces, cyniques et meurtriers.
Trump négocie avec Poutine un partage de l’Ukraine, car il veut récupérer la mise pour les entreprises américaines. Les dirigeants européens crient à la trahison mais que veulent-ils sinon leur part du gâteau ?
Pour nous entraîner dans leur guerre, les dirigeants politiques européens nous assènent une propagande nationaliste de plus en plus guerrière. Elle a un but : nous faire croire que le monde se découpe en blocs de pays concurrents, et pas en classes sociales opposées. Elle veut nous faire croire que nos intérêts sont ceux actionnaires et des patrons des entreprises qui nous embauchent.
Eh bien non, cette guerre impérialiste, refusons d’en être la chair à canon ! Il y a une autre voie : nous battre contre la domination de la bourgeoisie. Et pour nous, travailleurs de Belgique, cela signifie contre les Colruyt, Mestdagh, Frère, Bekaert et autres barons.