Deux mois après l’éclatement du scandale « Offshore Leaks » des paradis fiscaux, on continue à en apprendre de belles sur les pratiques des plus riches. Mais que les riches volent et trichent, on le savait. Ce qu’on oublie souvent, c’est à quel point l’État leur facilite la tâche !
Reynders, quand il était ministre des finances, avait instauré la « DLU », la déclaration libératoire unique, qui permettait à ceux qui avaient caché de l’argent en Suisse ou au Luxembourg, de le rapatrier en Belgique, en échange d’une amende ridicule de 6% à 10%. D’abord présentée comme une exception, la DLU est devenue la règle : de 2006 à 2012, 2,5 milliards d’euros ont été amnistiés. Et ce n’est pas l’épargne de monsieur tout le monde, car il s’agit de fraudes de plusieurs centaines de milliers d’euros à chaque fois. C’est évidemment autant d’argent qui a manqué dans les caisses de l’État, pendant qu’on nous imposait austérité, sauts d’index et coupes dans la sécurité sociale.
Avec la levée du secret bancaire au Luxembourg, prévue pour janvier 2015, le flux de déclarations s’est accru. Rien que sur les six derniers mois, 3000 déclarations supplémentaires ont atterri sur la table des fonctionnaires du ministère des finances.
C’est au point que les services administratifs sont débordés et ne peuvent traiter tous les dossiers ! Eh bien, pour permettre à ces messieurs de bénéficier du meilleur tarif, le gouvernement Di Rupo a prolongé la DLU. Mais si les Finances n’ont pas les moyens de traiter ces déclarations, ni d’ailleurs de mener des enquêtes approfondies sur toutes les autres sortes de fraudes, c’est dû à un manque criant de personnel. L’austérité a servi à justifier le non-remplacement de 3 départs en pension sur 5. Mais c’est un cercle vicieux : mois de fonctionnaires, moins de contrôles, plus de fraudes… et moins d’argent dans les caisses de la collectivité.
Le comble, c’est qu’après Reynders, Di Rupo s’apprête à lancer une nouvelle amnistie après celle qui s’achève maintenant ! Comme quoi le PS est autant l’ami des riches que le MR.
La même situation prévaut à la Justice. Le montant du blanchiment d’argent sale a atteint 2,25 milliards d’euros en 2012. Mais la moitié des dossiers a été classée sans suite, tandis que l’autre moitié échoue lamentablement, ce qui fait que l’Etat ne récupère que 1,5% de ces sommes !
Encore une fois, le manque de moyens montre avant tout le manque de volonté du gouvernement. Car peu lui importe que les riches fraudent, tant qu’il peut faire payer les pauvres ! Et sur ce plan là aussi, les chiffres sont sans appel : 45% des recettes de l’impôt viennent des taxes à la consommation, dont la TVA que seuls les travailleurs paient. En revanche, seuls 4% des recettes viennent de l’impôt sur les sociétés !
Ce sont autant de raisons de rejeter les mesures contre les pensions et l’index, qui sont encore une fois remises sur le tapis sous prétexte de limiter le déficit budgétaire.
L’argent est là, sous les yeux des politiciens au pouvoir, mais ils ne veulent pas le prendre ! Cette complicité avec les riches est profonde, car il s’agit en réalité bien plus que d’argent. En faisant peser tout le poids de la crise sur les épaules des travailleurs, le gouvernement accroit la misère et l’insécurité des milieux populaires et espère ainsi les rendre plus dépendants et donc plus dociles face au patronat.
Même si le scandale des paradis fiscaux oblige les gouvernements des pays riches à faire quelques gestes symboliques contre les « tricheurs », cela ne touchera que la couche moyenne des bourgeois. Les vraies grandes fortunes n’ont pas besoin de tricher : elles font voter des lois à leur avantage ! Peut-non imaginer que les États confettis que sont les îles Caïmans ou autres paradis fiscaux puissent exister sans l’accord tacite des grandes puissances?
Pendant que les actionnaires des grands groupes fi-nanciers et industriels font circuler leurs capitaux tout autour du monde, le reste de la planète reste plongé dans la misère.
Et en Belgique, tandis que les bourgeois s’inquiètent du rendement de leurs capitaux, 20% des enfants wal-lons et 14% des enfants flamands vivent en dessous du seuil de pauvreté.
La bourgeoisie ne mérite qu’une chose : qu’on lui confisque son pactole.