Il y a tout juste un siècle, en février 1917, les manifestations spontanées des ouvrières de Petrograd marquaient les prémisses de la révolution russe. Alors que la guerre faisait rage, le prolétariat de la capitale s’est porté à l’assaut de l’autocratie tsariste et a mis à bas l’un des régimes les plus tyranniques d’Europe. Contrairement aux espoirs de la bourgeoisie russe et de l’impérialisme, les exploités ne rentrèrent pas dans le rang. Chaque jour, ils apprenaient un peu plus à reconnaître leurs alliés et à démasquer leurs faux amis. Et finalement, le 25 octobre 1917, ils prirent la direction de la société et fondèrent, sur un territoire représentant le sixième du globe, le premier État ouvrier de l’histoire.
Le capitalisme avait subi sa première grande défaite face aux prolétaires. Les bolcheviks qui avaient dirigé l’insurrection d’octobre savaient bien qu’elle ne devait être qu’une première étape vers la révolution mondiale. La révolution russe donna de l’espoir à la classe ouvrière mondiale et des insurrections éclatèrent aux quatre coins de l’Europe. Mais partout elles échouèrent et la Russie révolutionnaire resta isolée. L’URSS dut se construire au milieu de puissances capitalistes hostiles qui n’avaient qu’une envie, renverser le pouvoir ouvrier. Cet isolement, avec toutes les conséquences qu’il eut sur la société russe, favorisa la naissance puis la domination d’une couche parasitaire dont Staline fut le premier chef.
Mais cette dégénérescence, qui s’approfondit jusqu’à la disparition de l’URSS en tant qu’État il y a 25 ans, ne peut effacer l’œuvre gigantesque accomplie par le prolétariat russe.
La Russie de 1917 était un pays arriéré soumis à une guerre civile attisée par les grandes puissances. Pourtant, la puissance émancipatrice de la révolution d’Octobre s’observa dans tous les domaines.
La nationalisation des terres et la possibilité pour les comités de paysans d’en organiser le partage et la culture librement, répondaient aux aspirations de la petite paysannerie, qui constituait la majorité écrasante de la population. Le contrôle ouvrier sur la production et la marche même des entreprises fut imposé par les travailleurs dès 1917 sous la forme d’une multitude d’organes de la démocratie révolutionnaire : comités d’usine, syndicats, associations ouvrières et soviets.
La révolution accomplit une tâche immense dans le domaine culturel par la formation en masse d’enseignants, la construction de bibliothèques, d’écoles, puis d’universités, pour combattre l’analphabétisme et l’arriération religieuse. Toute la Russie apprenait à lire, et lisait de la politique, de l’économie et de l’histoire, car le peuple voulait savoir et connaître.
La révolution d’Octobre jeta aussi les bases d’une égalité véritable entre les hommes et les femmes : égalité juridique, droit de vote et d’éligibilité à toutes les fonctions, droit au divorce, à l’avortement, à des congés maternité payés. Une politique de création de crèches et de cuisines collectives fut engagée pour décharger les femmes des charges ménagères.
La jeunesse, dont une grande partie s’échinait jusque-là dans les champs et dans les bagnes industriels, se vit enfin ouvrir de nouveaux horizons grâce à l’accès à l’éducation, à la culture. L’enthousiasme et l’énergie produits par les espoirs nés avec Octobre palliaient souvent en grande partie le manque de moyens matériels.
S’engageait ainsi la construction d’une économie nouvelle, débarrassée du règne de la propriété privée, du parasitisme des actionnaires et du profit. C’est sur cette base et grâce au dynamisme propre de ce premier État ouvrier que l’Union soviétique put connaître un essor industriel sans précédent, au moment même où l’économie capitaliste s’enfonçait dans la plus brutale crise de son histoire.
La victoire de l’insurrection d’Octobre était aussi la démonstration de la nécessité pour la classe ouvrière de disposer d’un instrument pour assurer son émancipation et celle de toute la société. Car si le Parti bolchevique, pas plus que d’autres organisations, ne joua aucun rôle dans le déclenchement du processus révolutionnaire de l’année 1917, il fut l’arme majeure de la victoire des exploités. Contrairement à l’image déformée transmise par les historiens de la bourgeoisie, c’était en 1917 un organe vivant, lié par de multiples organes à la classe ouvrière, dans les quartiers, dans les comités d’usine et jusque dans l’armée.
Aujourd’hui, le capitalisme et la domination de la bourgeoisie plongent chaque jour davantage l’humanité dans le chaos et l’incertitude. L’expérience de la révolution de 1917 est nécessaire pour les travailleurs qui veulent conduire l’humanité vers son émancipation.