Après les menaces des grandes puissances, comme la France, d’une intervention militaire en Syrie, la si-tuation est revenue à la case diplomatique. La propo-sition de la Russie de mettre sous contrôle internatio-nal les armes chimiques de la Syrie a repoussé l’option militaire. Mais pour combien de temps ?
Le fait que le débat se focalise autour des armes chimiques illustre bien toute l’hypocrisie de l’affaire. Il est impossible de savoir exactement combien de victimes a fait cette guerre, mais les estimations sont énormes : il y aurait au moins cent mille morts depuis le début d’après les organisations humanitaires. Et les armes chimiques n’y ont contribué que pour une part infime. Toutes les déclarations officielles autour du prétendu « droit international » sur l’utilisation des armes prétendues interdites ne servent qu’à masquer la politique impérialiste des grandes puissances.
Le régime politique syrien, celui de Bachar al-Assad, et avant lui celui de son père, est une dictature féroce depuis des décennies. Mais si l’impérialisme l’a toujours considéré comme un pouvoir qui lui tenait tête, il a su à plusieurs occasions composer avec lui pour maintenir l’ordre dans cette région du monde. Ce fut le cas par exemple en 1976 lorsque l’armée sy-rienne est intervenue au Liban pour maîtriser les mi-lices de gauche et les milices palestiniennes, ce que l’intervention militaire israélienne précédente n’avait pas réussi à faire. Et, il y a deux ans, lorsque le régime a répondu aux manifestations qui le contestaient par une répression meurtrière, les grandes puissances sont restées dans une attitude de passivité complice.
Les manifestations populaires ont disparu sous la terreur. En revanche, la Syrie est devenue le théâtre d’une guerre civile sanglante où des milices, armées par des puissances régionales rivales de la Syrie, comme l’Arabie saoudite, le Qatar ou la Turquie, se sont substituées à la lutte du peuple, et pour de tout autres objectifs. Elles s’opposent à l’armée d’Assad, elle-même soutenue par l’Iran. Les puissances impé-rialistes ont favorisé cette rébellion armée en pensant affaiblir ainsi Assad. Mais elles ne veulent pas non plus de victoire de cette rébellion armée, maintenant dominée par des groupes islamistes intégristes qui sont pour elles incontrôlables.
Que faire alors ? Pour l’instant, les dirigeants occi-dentaux ne souhaitent ni la victoire d’Assad, ni celle de l’opposition, ou bien voudraient se donner le temps d’imposer à Assad un compromis sauvegardant leur influence. Et pendant ce temps la guerre dure, avec son lot de destructions et d’atrocités. Voilà ce que cache l’écran de fumée de la discussion sur les armes chimiques…