Avec environ 120 000 participants, la manifestation nationale du 6 novembre a été un franc succès. Dès le matin, les gares ont été prises d’assaut et les trains étaient bondés, au point que la SNCB a dû ajouter 16 trains supplémentaires pour emmener les manifestants à la Gare du Nord, le point de départ de la manifestation. Et une fois à la gare, il fallait encore de longues minutes pour en sortir tant elle était pleine à craquer. A dix heures du matin, soit deux heures avant le départ officiel, la foule était déjà là, et les travailleurs présents ont démarré, sans attendre le signal du départ. Le soir, à 16 heures, les derniers manifestants n’étaient pas encore arrivés à la gare du midi.
Le chiffre de 120 000 manifestants est indirectement confirmé par la SNCB qui a annoncé avoir vendu 80 000 billets au tarif spécial « événement » qu’elle avait activé spécialement pour ce jour-là.
Il était frappant de voir que, contrairement aux manifestations précédentes, les appels à la manifestation avaient eu un écho bien au-delà des cercles syndicaux habituels. Certes, bien des manifestants étaient venus avec leur délégation syndicale, en rouge, en vert ou en bleu, mais beaucoup étaient venus d’eux-mêmes. Et on a pu voir défiler aussi bien des délégations d’entreprises privées, comme Delhaize, Caterpillar ou Total, que de services publics tels que la santé ou l’enseignement qui étaient aussi très présents.
Et puis, contrairement aux légendes qu’auraient voulu faire croire le gouvernement, et en particulier la NVA, ce n’est pas que le sud « francophone et gréviculteur » qui était là mais, au contraire, les travailleurs flamands se sont déplacés en masse pour manifester ! D’ailleurs, Anvers, Gand ou Courtrai étaient complètement paralysées faute de transports en commun : les chauffeurs de De Lijn étaient en train de manifester à Bruxelles, avec ceux des TEC de Liège et Charleroi.
Cela montre bien à quel point l’ensemble de la population laborieuse a conscience de la gravité des attaques gouvernementales et de l’urgence de se mobiliser pour les contrer.
Par coïncidence, le jour même de la manifestation, éclatait le scandale « LuxLeaks » : des fuites émanant de la société de conseil fiscal PWC montrent que des riches familles et entreprises belges ont pu, avec la complicité des gouvernements, éluder l’impôt pour des montants estimés à plusieurs milliards d’euros.
Ce scandale éclaire des affaires à la limite de la légalité, voire franchement illégales. Mais c’est en réalité tout le système économique qui est conçu pour permettre aux grandes fortunes de s’enrichir encore plus sans rien payer en retour. Et c’est ce système qui fait qu’au bout du compte les caisses sont vides : comment pourrait-il en être autrement quand les riches engagent des experts en fraude fiscale pour ne payer que 2% d’impôts au lieu de 34% ? Le soi-disant « problème des retraites », ou le « trou de la sécurité sociale » ont été créés par les gouvernements au service des riches, et c’est aux travailleurs qu’ils veulent le faire payer !
Alors il était grand temps que les travailleurs se mobilisent pour dire non ! Et c’est ça qui ressortait de cette manifestation. On en a marre de se serrer la ceinture et de devoir se passer de l’essentiel, de s’inquiéter pour l’avenir des enfants qui n’ont pas assez de profs et qui n’auront pas de travail parce que les patrons coupent dans les effectifs pour augmenter leurs profits. On en a marre de travailler dans des conditions qui empirent pour une pension ridicule et reportée à 67 ans.
Evidemment une manifestation ne suffira pas à arrêter Charles Michel et Bart de Wever, ni les patrons qui les soutiennent. Mais cette manifestation est un encouragement pour tous. Le fait que 120 000 travailleurs se sont déplacés à Bruxelles ne peut qu’inciter les millions d’autres à faire de même.
Les prochaines étapes annoncées par les syndicats sont les journées de grève régionale le 23 novembre, le 1er et le 8 décembre, puis la grève générale nationale le 15 décembre. Il en faudra probablement d’autres pour que le patronat se mette en tête qu’il n’aura rien de plus et qu’il faudra qu’il paie pour les retraites, pour des salaires décents et des services publics au service de tous, ou il risquera de perdre bien plus que quelques jours de grève.
C’est possible si chaque travailleur mobilise autour de lui pour faire en sorte que les prochaines actions soient des succès, qui encouragent à chaque fois de nouveaux travailleurs à rejoindre le mouvement. La mobilisation a commencé, il faut qu’elle continue !