Comme tous les deux ans, patronat, gouvernement et syndicats négocient un accord interprofessionnel qui va fixer les augmentations de salaires maximales.
Et comme à chaque fois on assiste à une bataille de chiffres entre les uns et les autres. Maximum 0,8% selon les patrons, au moins 1 ou 1,5% selon les syndicats. Dans les deux cas, c’est bien insuffisant.
Le dernier rapport d’Oxfam sur la richesse colossale d’une infime minorité d’ultra-riches a remis en lumière l’immensité des inégalités sociales, partout sur la planète. Quand il y a autant de richesses accumulées, quel sens cela a-t-il que des ouvriers, des employés ou des pensionnés, qui travaillent, qui ont travaillé toute leur vie n’arrivent pas à vivre décemment ? Pourquoi vouloir acculer encore plus les chômeurs à la misère, alors que les entreprises qui les ont licenciés continuent à faire des profits ? Quel avenir pour les jeunes, condamnés à être flexibles, à accepter des salaires ridicules où à rejoindre eux-aussi les rangs des chômeurs ?
Tout cela au nom de la productivité des entreprises ! Uniquement parce que la richesse des actionnaires dépend de chaque centime dont ils privent les salariés. C’est la loi de l’économie capitaliste que Marx a dénoncée il y a déjà plus de cent cinquante ans et que les travailleurs subissent tous les jours : les capitalistes s’enrichissent avant tout en ne payant pas aux travailleurs la vraie valeur de leur travail. Plus les salaires baissent, plus les profits augmentent.
Le capitalisme se nourrit de l’injustice.
C’est dans sa logique même de réduire les salaires le plus possible et payer le moins d’impôts possible et de faire ainsi peser le poids de la société sur le reste de la population, cette immense majorité qui n’a justement pas de moyens. Le rôle des gouvernements est uniquement de gérer cette injustice sociale profonde, de maintenir les salaires bas par des lois sur la compétitivité, de réduire les services publics à peau de chagrin, laissant aux travailleurs des écoles délabrées, des hôpitaux en sous-effectifs et des trains en retard.
Le gouvernement se pose en arbitre, mais c’est un arbitre corrompu : tous les partis défendent ouvertement le patronat. Le MR qui nous éreinte avec ses flexi jobs et la pension à 67 ans, la N-VA qui veut en finir avec l’indexation des salaires, l’Open VLD qui veut limiter encore plus les allocations de chômage dans le temps, le CD&V qui refuse de toucher à cette fameuse loi sur la compétitivité, etc.
Encore et toujours, les partis politiques répètent que la santé de l’économie exige encore et toujours plus de sacrifices de la part des travailleurs. Mais ce n’est évidemment que de la santé des profits patronaux dont ils se préoccupent.
Dans le contexte des négociations de cet accord interprofessionnel, les syndicats ont appelé à une grève nationale le 13 février et elle a été massivement suivie. Il faut que le patronat se rende compte que le monde du travail ne se laissera plus faire et qu’il n’a pas d’autre choix que d’augmenter sérieusement les salaires, les pensions et les allocations.
Les directions syndicales se sont réjouies d’avoir obtenu 1,1% au lieu des misérables 0,8% proposés par le patronat, mais ce n’est pas une victoire pour autant. Ce ne sont pas 10 euros par mois de plus qui vont réellement changer le sort des familles populaires. En réalité, il faudrait au moins 300 à 400 euros d’augmentation par mois pour compenser des années de perte d’un pouvoir d’achat, amputé par les sauts d’index et les statistiques truquées.
Quoi qu’on obtienne, il faudra plus qu’un jour de grève pour y arriver.
Les attaques patronales se succèdent, mais il y a aussi des réactions. Le mouvement des Gilets Jaunes, les manifestations des Jeunes pour le Climat montrent que nous sommes de plus en plus nombreux à ne plus accepter le mélange de misère et de catastrophes écologiques que le capitalisme nous propose comme avenir.
La grève du 13 février pourrait être un point de départ pour mobiliser d’autres couches du monde du travail. Plus il y aura de telles mobilisations, plus les travailleurs se rendront compte de la force réelle qu’ils représentent, plus il sera possible de faire plier la bourgeoisie et voire même à terme contester son pouvoir sur la société.