Ce jeudi 5 octobre, les syndicats ont appelé à manifester contre la loi du ministre de la Justice, Van Quickenborne, qui permettrait d’interdire à toute personne ainsi condamnée de participer à toute manifestation, pendant 3 à 5 ans. La loi parle d’atteinte grave aux personnes ou aux biens. La notion de gravité est toute relative et ceux qui vont en juger sont des magistrats qui ne sont en général pas du côté des manifestants.
La police se permet déjà, lors de manifestations, de matraquer qui elle veut ou d’arrêter qui bon lui semble.
Mais on se doute bien qu’il ne s’agit évidemment pas de réprimer cette violence-là !
La Belgique n’est d’ailleurs pas la seule à s’être lancée dans cette voie. Macron a pris prétexte, dès 2019, du mouvement des gilets jaunes pour faire passer une loi dite « anti-casseurs » bien plus répressive encore, et qui sert à chaque manifestation avec tous les abus que la presse a rapporté depuis quatre ans.
L’objectif d’une telle loi est d’abord de décourager les manifestations. Les travailleurs ont mille raisons de se révolter contre ce système social injuste, contre les licenciements comme chez Delhaize ou Colruyt, contre l’inflation qui nous éreinte. Il y a de quoi être en colère contre la casse sociale dont le patronat est le premier responsable et dont le gouvernement est complice. Les partis qui se succèdent dans les gouvernements préfèrent empêcher les classes populaires d’exprimer cette colère plutôt que de s’attaquer à sa cause : l’appétit de profit des riches. Pas question pour ces ministres de prendre le moindre centime dans la poche des nantis pour compenser les effets des crises économiques dont ils sont pourtant les premiers responsables.
Cette loi sert aussi au gouvernement à envoyer un signal au patronat pour lui dire qu’ici aussi en Belgique, les partis au pouvoir sont prêts à réprimer les futures tentatives du monde du travail de résister. Ils le font avec d’autant plus d’empressement qu’ils se sentent menacés sur leur droite par la N-VA ou le Vlaams Belang. Ils veulent montrer à la grande bourgeoisie belge qu’elle n’a pas besoin de recourir à l’extrême droite, comme en Italie, pour avoir à son service un gouvernement capable de manier le bâton contre les classes populaires.
Quand les syndicats demandent au PS ou à Écolo de ne pas voter la loi, ils entraînent les travailleurs dans l’illusion que ces partis qui ne remettent pas en question le capitalisme pourraient faire autre chose que jouer la même musique que les autres. En général, ils ne s’opposent à la bourgeoisie que poussés dans le dos par la mobilisation des travailleurs et, en général, pour récupérer le mouvement et le trahir.
Or, c’est justement ce que cette loi leur permettra : ne plus permettre au monde du travail de leur imposer sa volonté.
Certes, ce n’est pas une loi qui va empêcher les mobilisations. N’oublions pas que le droit de grève et celui de manifester sont bien récents. Pendant des dizaines d’années, tout cela était illégal. Eh bien, les travailleuses et les travailleurs l’ont quand même fait.
L’immense majorité des lois, et les forces de répression chargées de les faire appliquer, servent en fait à maintenir l’ordre établi. La première chose que l’État et la loi bourgeoise protègent, c’est la propriété privée. Oh, pas la maison qu’un salarié a pu se payer après des années de patience, mais bien les immenses fortunes amassées par les riches grâce au travail des autres, ainsi que leurs usines et leurs entreprises. La seule chose que craignent les bourgeois, c’est justement la révolte de toutes celles et ceux qui ont sué pour produire leurs richesses, qu’ils ont licenciés, dont ils ont volé le droit à la retraite pour les exploiter encore plus longtemps et dont ils font encore une fois les poches grâce à l’inflation. Toutes les lois sont là pour les protéger et celle-ci en fait partie. Comment pourrait-il en être autrement dans un monde où les plus riches disposent de fortunes parfois supérieures à celles d’un pays ? L’État n’est pas un arbitre au-dessus de la société, il n’est là que pour gérer les affaires de la bourgeoisie afin qu’elle puisse perpétuer sa domination et la police est là pour maintenir l’ordre, mais pas n’importe lequel : l’ordre injuste des riches sur les pauvres.
C’est pour cela que nous disons que l’on ne peut rien en attendre et que les travailleurs n’ont pas d’autre perspective que de lutter eux-mêmes contre chaque injustice économique ou sociale, contre les lois qui les aggravent. Cette lutte ne cessera que lorsque le monde du travail prendra définitivement le contrôle de la société afin de la faire fonctionner pour le bien commun et plus pour l’intérêt d’une minorité.