La direction belge de Delhaize vient d’annoncer lors d’un conseil d’entreprise extraordinaire le licenciement de 2500 travailleurs et la fermeture ou le passage en franchise de 14 magasins dans le pays. Tous les sites seront touchés par les licenciements, pas uniquement les 14 concernés par les fermetures. Mercredi, 17 magasins de Bruxelles sont partis en grève, mais aussi ceux de Eupen, Wavre, La Louvière, Herstal ou Diest en Flandre.
Même si certains des magasins que la direction veut fermer seront repris en franchise, ce qui pourrait faire baisser le nombre de licenciements, le statut des travailleurs sera revu à la baisse. C’est aux conditions de travail de l’ensemble du personnel que la direction veut s’en prendre. Elle veut revoir les barèmes, modifier le système de pauses et l’organisation globale du travail. La procédure Renaud a été lancée et les organisations syndicales ont couvert les débrayages, sans toutefois avoir pris l’initiative de les organiser de manière systématique sur tous les sites. Delhaize fait pourtant des bénéfices, 410 millions d’euros en 2012. C’est un grand groupe de distribution, présent partout dans le monde, qui a fait 5 milliards de chiffre d’affaires l’année passée. Mais pour les actionnaires, ce n’est pas suffisant. Certes, il n’y a aucune perte à l’horizon, aucune faillite de Delhaize en vue. Mais le bénéfice par action qui est passé de 2,94 euros en 2011 à 4,03 en 2012, pourrait bien baisser en 2014. Et ça, c’est intolérable aux yeux des actionnaires. Ces messieurs ne travaillent pas, ils vivent de la sueur des autres et ils ont le pouvoir de décider de la vie de milliers de personnes pour accroître encore un peu leur fortune personnelle. Voilà le fond de l’affaire. Il n’y a pas d’autre manière de l’envisager
Car les capitalistes ont une manière toute spéciale de calculer. Pour eux, faire moins de profits, c’est une perte ! C’est la logique de ce système, où les mots perdent leur sens premier : ne plus gagner assez, c’est perdre de l’argent ! Alors, malgré tous ces profits, Delhaize compte s’en prendre aux travailleurs, les faire travailler plus pour vendre plus avec moins de personnel et… gagner encore.
Rien ne nous oblige à accepter cette logique. C’est celle des patrons, ce n’est pas la nôtre. Delhaize emploie plus de 16 000 travailleurs en Belgique, si tous se mobilisaient, ce serait une force contre la direction. Et les travailleurs de Delhaize ne sont pas les seuls touchés par les licenciements. Depuis 2010, rien que les grandes entreprises comme Caterpillar, ArcelorMitall, Carrefour, Opel et Ford ont licencié près de 20 000 travailleurs. Toutes ces pertes d’emplois viennent gonfler le chômage qui pèse lourdement sur l’ensemble du monde du travail. C’est une vraie catastrophe qui prive les uns de leur gagne-pain et pèse matériellement et moralement sur ceux qui ont encore un emploi. Augmentation des cadences, accidents de travail, maladies dues à la dégradation des conditions de travail, baisse des salaires sont l’autre face des licenciements.
Bien sur, Di Rupo s’est fendu d’une petite phrase, exprimant sa solidarité avec les travailleurs. Exactement comme on présenterait ses condoléances pour une grand-tante décédée. Mais cela ne changera rien à la situation ni à la volonté des patrons.
Voilà pourquoi, l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des bénéfices, comme Delhaize, fait partie des mesures d’urgence nécessaires pour le monde du travail. Une mesure que ne prendra pas le prochain gouvernement. Une mesure qu’il faudra imposer au patronat et au gouvernement par une mobilisation générale des travailleurs, par des grèves et des manifestations. Cela ne sera pas facile, mais ce que montre ce dernier plan de restructuration de Delhaize, c’est que nous n’avons pas d’autre alternative.