Combien d’enfants, de femmes et d’hommes sont morts noyés dimanche dans le naufrage de leur embarcation au large de la Libye ? 700, 800, 900 aux dires de certains survivants ? On ne le saura peut-être jamais, mais ce naufrage fait suite à d’autres tout autant effroyables et ce n’est pas le dernier.
Quand cette hécatombe cessera-t-elle ? Combien de Syriens, d’Érythréens, de Soudanais ou de Somaliens devront encore mourir aux portes de l’Europe avant que l’Union européenne daigne lever le petit doigt ?
Avec la multiplication des passeurs sur les côtes libyennes et l’afflux de migrants ces derniers mois, l’urgence de la situation était connue. Et qu’a fait l’Union européenne ? Elle a refusé de participer au financement du dispositif de sauvetage mis en place par l’Italie qui avait fait ses preuves en sauvant 150 000 vies.
En réduisant le nombre et la portée des patrouilles, les dirigeants de l’UE ont fait le choix de laisser mourir ceux qui tenteraient la traversée. C’est de la non-assistance à personne en danger. Les navires et les hélicoptères, qui ont été envoyés sur les lieux du drame mais après le naufrage, rajoutent à l’ignominie.
Après avoir séché leurs larmes de crocodile, ces mêmes dirigeants s’entendront pour durcir leur politique criminelle contre les migrants. Car s’ils veulent que l’Europe « coopère », ce n’est pas pour sauver les migrants, c’est pour les refouler ! C’est exactement le sens du programme en dix points qui vient d’être annoncé : lutte contre les réseaux, blocage des routes d’immigration, renvoi rapide des immigrés, etc. Toujours dans le même sens, Jan Jambon, le ministre de l’intérieur N-VA, a déclaré que ce qui comptait, c’était « que ces gens ne puissent plus monter dans les bateaux ». C’est dire que le sort de ces femmes et de ces hommes qui fuient la guerre et la misère ne les intéresse pas du tout. Et pourtant, il y aurait de quoi car ce sont bien les manœuvres guerrières des puissances impérialistes en Irak, en Syrie ou en Libye, qui ont conduit au dépeçage des États par des milices surarmées, qui ont détruit l’économie des pays de la région et qui ont aggravé le sort des peuples qui y vivaient.
Tout cela, les dirigeants, belges et européens s’en moquent mais, en plus, ils ferment les voies sécurisées et légales pour demander l’asile et traquent les candidats à l’asile comme des parias, ce qui les condamne à se retrouver sous la dépendance de passeurs sans scrupules. Jambon et Francken dans le gouvernement Michel, comme Maggie de Block dans le gouvernement Di Rupo, peuvent dénoncer les passeurs, mais ce sont eux qui exposent les migrants à des risques de plus en plus grands.
Près de 4 millions de Syriens ont fui leur pays, en guerre depuis 2011 ; la Belgique n’en a accueilli que 4300, c’est une goutte d’eau. La grande majorité s’est réfugiée en Turquie ou au Liban, c’est-à-dire dans les pays voisins. Seule une petite fraction tente de rejoindre l’Europe développée, mais cela suffit aux politiciens pour parler de problèmes migratoires et pour associer migration avec chômage et criminalité. Agiter ce fantasme quand des enfants, des femmes et des hommes meurent sous des bombes est révoltant. Cela ne sert qu’à désigner les populations plus faibles comme boucs émissaires des problèmes sociaux, alors que les responsables de ces problèmes, ce ne sont pas les migrants d’ailleurs mais les riches d’ici ! C’est leur pouvoir sur la société qui crée tant d’inégalités et d’injustices.
Les dirigeants européens s’échinent à tenir les peuples les plus pauvres à distance. Mais le système qu’ils servent multiplie la misère, les guerres et les persécutions. Ils ont toujours les mots « démocratie », « paix », et « développement » à la bouche. Mais qu’ont-t-ils apporté à l’Afrique, si ce n’est le pillage continu de ses richesses ?
Condamner les peuples au dénuement extrême, les emprisonner dans leur situation d’exploités fait partie de la guerre menée par la bourgeoisie contre les pauvres en général. La lutte que les États riches mènent contre les migrants en est un aspect infâme.
L’Europe concentre de formidables richesses. Mais elles s’accumulent dans les poches d’une minorité, sont gaspillées dans des caprices de riches ou dans la spéculation et manquent cruellement pour satisfaire les besoins de la majorité.
Ce système capitaliste n’accordera jamais à tous le droit de vivre dignement. Pour mettre fin à cette barbarie, les travailleurs doivent arracher les moyens de production des mains de la minorité capitaliste et en prendre eux-mêmes le contrôle.