Lors de sa formation, le gouvernement Michel avait annoncé la fin de « l’amateurisme », avec lui, les choses allaient être bien gérées, les comptes seraient tenus rigoureusement et le budget de l’État serait entre de bonnes mains. Il n’a pas fallu longtemps pour que ces proclamations apparaissent pour ce qu’elles sont : des fanfaronnades.
La semaine dernière, à l’occasion du contrôle budgétaire, la presse a divulgué que le gouvernement avait un trou de 2,2 milliards d’euros dans le budget 2016. Le lendemain, le chiffre avait gonflé à trois milliards. Le yoyo a continué pendant plusieurs jours et les chiffres actuels seraient de l’ordre de 1,5 milliard d’euros de déficit. Un tel flou dans des chiffres aussi importants est impressionnant ! On est en droit de se demander ce que valent ces politiciens qui n’ont pas l’air capables de savoir à un milliard près quel est l’état des comptes…
On a surtout vu à cette occasion comment les chiffres pouvaient être manipulés pour faire apparaître ou disparaître des pans entiers du budget. Un coup, on enlève les dépenses liées à la sécurité, un autre, on ajoute les revenus de taxes qui n’existent pas encore, et ainsi de suite sans qu’on sache vraiment quand ça va s’arrêter.
La déclaration de la ministre du Budget, Sophie Wilmès, MR, est d’ailleurs édifiante : elle dit que, finalement, ce serait tout à fait envisageable de reporter le retour à l’équilibre budgétaire à 2019 au lieu de 2018, voire même encore plus tard. Comme quoi, « l’urgence » budgétaire n’est que de la fumisterie, mais une fumisterie qui a quand même servi à imposer le saut d’index, le blocage des salaires, l’augmentation de la TVA et le Tax Shift – autant de mesures qui pèsent sur la vie de millions de familles.
Quand le gouvernement veut apparaître comme un bon gestionnaire, il trafique les comptes dans le sens de réduire le déficit. Quand il veut faire un chantage pour justifier de nouvelles mesures d’austérité, il n’a qu’à aggraver les comptes. Ainsi, après le « trou de la sécu », voici le retour du « trou budgétaire », avec le nouveau train de mesures antisociales que cela risque de justifier, en tout cas aux yeux du gouvernement.
Les réactions dans ce sens n’ont d’ailleurs pas tardé : De Wever a redit qu’il fallait encore plus couper dans les dépenses de la sécurité sociale. Le VLD, Bart Tommelein, en charge de la « fraude sociale » prétend que le déficit pourrait être réduit en généralisant le système des « flexi-jobs ». Ce système, autorisé depuis plusieurs mois dans le secteur de la restauration, permet aux patrons de prendre des travailleurs en 1/5ème de temps avec des charges sociales réduites et faisant payer les heures supplémentaires par la sécurité sociale. Ce système est un esclavage moderne qui entérine le fait que les travailleurs n’ont plus assez avec un seul emploi pour joindre les deux bouts. Mais, surtout, il est tout à fait hypocrite de prétendre qu’il va remplir les caisses de l’État !
L’autre mesure immédiatement prise est une nouvelle « DLU » : ce système qui permet aux fraudeurs de rapatrier leur argent depuis les paradis fiscaux va être renouvelée une fois de plus, et même devenir permanent. Pas mal pour une amnistie fiscale qui était censée n’avoir lieu qu’une seule fois… en 2004 !
La troisième mesure annoncée est l’augmentation du prix du diesel.
Pas besoin de grands discours pour comprendre comment le gouvernement utilise le prétexte du trou budgétaire pour faire passer des mesures qu’il avait déjà en préparation et qui vont toutes dans le même sens : plus de cadeaux aux patrons et plus de sacrifices pour les travailleurs.
Il est prévisible qu’un budget basé sur la réduction des taxes payées par les patrons et les plus riches ne peut être qu’un panier percé. Et il est évident que ceux qui font ce genre de budgets le savent très bien mais qu’ils comptent encore et toujours faire payer l’ardoise par les couches populaires de la société.
La seule différence entre ce gouvernement et le précédent tient dans les discours, car dans les actes, c’est la même politique. Finalement, que les politiciens à la manœuvre soient des incompétents, des manipulateurs ou des escrocs n’y change rien.
Il n’y aura des comptes « justes » que quand les travailleurs y mettront leur nez. Il faudrait pour cela qu’ils imposent que soient rendus publics les comptes de l’État, des banques et des grandes entreprises. La population verrait alors comment la bourgeoisie pille toute la société et que, contrairement aux discours, les moyens existent afin de créer des emplois pour vivre dignement, alléger le travail et répondre aux besoins de la collectivité.