A deux mois des élections législatives et européennes du 9 juin, les partis ont lancé le grand cirque électoral. Chacun a sa tactique. Le MR courtise la classe moyenne et veut se distancier du gouvernement actuel pour ne pas être associé à ses échecs.
Le PS et le PTB font de la surenchère à gauche. Côté PS, Magnette se lance sur le terrain de la taxe des millionnaires, alors même que le PTB a reculé en portant le seuil imposable à cinq millions au lieu d’un, pour ne pas effaroucher d’éventuels électeurs de la classe moyenne. Le PTB essaye de ratisser plus large en incluant des thèmes écologistes à son programme, espérant peut-être récupérer ainsi l’électorat déçu d’écolo.
Les « Engagés », eux, profitent d’une cure d’opposition pour gagner quelques points dans les sondages. Avec le PS, ils ont fait machine arrière sur le décret paysage qui risquait de priver des milliers d’étudiants de financement. Ils étaient d’accord pour leur couper les vivres, mais pas à la veille des élections !
En Flandre, le parti d’extrême droite Vlaams Belang caracole en tête des sondages, avec 27% des intentions de vote. Il est suivi de près par la N-VA de Bart de Wever qui louvoie entre deux eaux : en Flandre, il refuse de s’allier au Vlaams Belang, mais en Wallonie il se lance avec un candidat qui soutient ouvertement Le Pen et Orban. L’extrême droite progresse en se présentant comme antisystème, alors qu’en réalité, derrière leurs discours nationalistes et racistes, ils défendent la bourgeoisie contre tous les travailleurs.
Ces jeux politiciens ne changeront pas l’avenir des travailleurs, des chômeurs, des jeunes ou des pensionnés. Car des promesses, il y en a tellement eu ! La question n’est pas tant de promettre que d’être capable de tenir ses engagements. Tous les partis font semblant d’ignorer que dans notre société capitaliste, ce sont les grands capitalistes qui en tirent les ficelles. C’est la FEB, la Fédération des Entreprises de Belgique, qui décide de l’agenda des gouvernements. Les bonnes intentions, sincères ou non, des politiciens ne font pas le poids face au pouvoir du patronat car c’est lui qui contrôle l’ensemble de l’économie.
Aucune loi ne peut toucher à ce pouvoir. Certes, le PS, le PTB et même parfois le MR, s’insurgent contre les « abus » des grands groupes comme Amazon, Apple ou autres géants incontrôlables. En se focalisant sur les excès, ils entérinent le capitalisme « normal » : tous les jours, les travailleurs produisent pour un salaire insuffisant tandis que leurs patrons s’enrichissent sans rien avoir à faire.
Dans la démocratie de façade dans laquelle nous vivons, la population travailleuse est invitée à choisir des représentants qui, une fois élus, se garderont bien de remettre en cause le droit des patrons à posséder leurs entreprises et à s’enrichir du travail des autres.
C’est pourtant là que se situe le nœud du problème, car c’est de cet appétit de profit que viennent la pauvreté, le sous-financement des services publics, les dettes, les guerres, la pollution et l’immense majorité des problèmes de la planète.
Remettre en cause le pouvoir des capitalistes exigerait en premier lieu de mettre notre nez dans leurs comptes et de lever le secret des affaires afin de voir où vont les richesses produites par notre travail. Cela exigerait ensuite d’imposer au patronat de payer des salaires corrects et de payer des impôts afin qu’ils contribuent eux-aussi aux coûts liés à la santé publique, à l’enseignement ou aux transports. Cela signifierait donc de décider à leur place où va l’argent. Et ça, le patronat ne l’acceptera que s’il y est contraint et forcé.
Voilà pourquoi, la vraie question, ce n’est pas tant le programme des partis qui se disent « de gauche » et qui disent vouloir le bien des travailleurs, mais les moyens dont on forcera les patrons à ouvrir leurs comptes et à payer leur dû.
Voter des lois ne suffira pas, car qui va les appliquer ? Certainement pas cette police qui réprime les manifestations !
Il est illusoire d’imaginer que les capitalistes vont céder un gramme de leur pouvoir sans se battre, d’imaginer que l’État, sa police, sa justice, vont défendre le monde du travail contre l’appétit de profits de ces vautours. Voilà des dizaines et des dizaines d’années que, élection après élection, les mêmes promesses sont faites sans que rien ne change, car rien ne peut changer avec un bulletin de vote.
Les travailleurs n’ont jamais rien reçu, tout ce qu’ils ont arraché a été le fruit de leurs luttes. C’est avec ces luttes que nous devons renouer.
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La drogue, fléau du capitalisme
Bruxelles a été le théâtre d’une série de fusillades au cours des derniers mois. Il y en a eu à Forest, Saint-Gilles, Molenbeek, Laeken, Anderlecht et Saint-Josse. A chaque fois, il y a eu des blessés, parfois des morts.
La plupart d’entre elles ont été attribuées au trafic de drogues et, depuis, les habitants des quartiers où cela s’est produit vivent dans un climat de peur. Ils craignent à juste titre que cela se reproduise et qu’eux ou leurs proches se retrouvent victimes d’une balle perdue. Beaucoup d’entre eux dénoncent les points de deal qui sont autant de lieux où la violence règne, sous une forme ou une autre.
Le Conseil National de Sécurité s’est réuni le 27 mars, mais les mesures annoncées par le gouvernement ne sont évidemment pas à la hauteur des problèmes : renforcer la coordination des services de police et expulser les dealers étrangers ne suffira pas. Quand bien même de nouveaux policiers seraient recrutés, ces mesures sont inefficaces car axées exclusivement sur la répression.
Cette politique ne fonctionne pas ; ni en Belgique – cette dernière a déjà augmenté les effectifs policiers et douaniers –, ni ailleurs. La France, par exemple, qui est le pays le plus répressif d’Europe est aussi celui où la consommation est la plus forte ! L’augmentation actuelle de la violence est elle-même la conséquence des attaques récentes contre les milieux de la drogue, qui ont eu pour effet de l’éclater en une myriade de petits réseaux qui luttent chacun pour leurs territoires. La répression ne règle rien, elle ne fait que déplacer le problème. Si elle fonctionnait, il y aurait moins de drogues en circulation ; or, de toute évidence, ce n’est pas le cas.
Dans de nombreux pays, y compris aux USA où la répression a longtemps été la seule approche, c’est la légalisation qui a fait diminuer la violence dans les États où elle est mise en œuvre.
D’ailleurs, cette vision répressive n’est pas neutre : elle fait porter le chapeau aux consommateurs au lieu de chercher à les soigner. Pour quelques usagers « récréatifs », combien y a-t-il de personnes devenues dépendantes, qui auraient bien plus besoin d’être aidées que jetées en prison ?
Bien sûr, une approche basée sur la prévention exigerait de dégager des budgets pour traiter les victimes d’addiction. Il est bien plus facile et moins onéreux de les accuser de tous les maux !
Et surtout, la prévention exigerait de reconnaître que les addictions sont un problème social et pas le simple résultat de choix individuels. L’alcoolisme, la toxicomanie et l’addiction aux médicaments se nourrissent de l’angoisse du lendemain, des rythmes de travail et de vie insoutenables, de la mise en concurrence au travail et des pressions répétées qui minent une grande partie de la population laborieuse, parmi laquelle de très nombreux jeunes.
Le sentiment d’impuissance et de désespoir devant l’inhumanité de cette société pousse à la recherche de paradis artificiels, qui ne sont paradisiaques que le temps d’un plaisir fugitif, suivis de l’enfer du manque.
Lutter à la racine contre les addictions, c’est donc aussi lutter contre l’exploitation de la population par les capitalistes.
Or, pour eux, la drogue est aussi un juteux business, en commençant par les drogues légales que sont le tabac et l’alcool. Les fabricants de cigarettes et les producteurs d’alcool sont déjà sur les rangs pour prendre des parts dans le marché du cannabis. Et que dire de ces firmes pharmaceutiques dont les opioïdes comme le fentanyl ont fait des centaines de milliers de victimes. Ces marchands de mort ont pignon sur rue et ont leurs entrées dans tous les gouvernements pour maintenir leur droit à empoisonner. Cela n’est pas nouveau et on pourrait remonter au XIXe siècle, quand les entreprises anglaises ont introduit l’opium en Chine, transformant la consommation récréative d’une minorité en catastrophe faisant des millions de victimes. Tout ça avec l’appui de l’armée anglaise, qui est intervenue quand le gouvernement chinois a tenté d’interdire la vente de l’opium.
Si les capitalistes avaient le moindre souci de la santé des travailleurs, cela se saurait !
Dans sa quête de profits, le capitalisme se nourrit de tout, même du plus nuisible, des engins de mort aux produits toxiques, pourvu que ça rapporte ! C’est bien le signe de son pourrissement. C’est pourquoi la prévention ne peut être que radicale, par un changement profond de la société, qu’il faut remettre sur ses pieds et faire fonctionner d’abord au service de l’humanité.
Il faut prendre sur les profits du patronat
Après l’inflation qui a marqué les deux dernières années et qui a déjà durement frappé les classes populaires, le prochain coup va venir des gouvernements européens qui se sont mis d’accord pour imposer une nouvelle cure d’austérité. Ou peut-être devrait-on dire une nouvelle saignée ?
Le parlement européen est en train de finaliser nouvelles règles d’austérité. Selon les estimations du Bureau du Plan, cela impliquerait une réduction budgétaire de 4 à 5 milliards d’euros par pour la Belgique. A titre de comparaison, c’est quasiment le budget de l’enseignement en Wallonie.
Les « critères de convergence » de Maastricht qui imposaient l’austérité au nom de la réduction de la dette ont été mis en suspens durant la période du Covid. Le plus urgent pour les gouvernements était de compenser les effets du virus sur l’économie. Beaucoup d’entreprises ne pouvaient plus fonctionner à cause de la distanciation sociale qui était nécessaire pour limiter la propagation de l’épidémie. Afin de leur éviter la faillite, l’État belge, comme la plupart des autres États, a payé un salaire minimum aux salariés à la place de leur employeur, et a vidé ses caisses pour aider directement des dizaines de milliers d’entreprises. A ce moment-là, plus question de réduire la dette ou de diminuer le déficit. Il a explosé.
Il aurait été possible d’imposer aux entreprises qui ont fait des profits plantureux pendant les années précédentes, de prendre sur leurs réserves pour payer les salaires, quitte à exiger que les actionnaires remettent dans le pot une partie de leurs dividendes. Au contraire, l’État a choisi, comme toujours, d’ouvrir les caisses publiques pour préserver les profits des entreprises. Il était évident que ça impliquait de réclamer aux travailleurs de combler le trou ultérieurement. Il semble que dans l’esprit du gouvernement, ce moment soit arrivé.
A la crise du Covid, s’ajoutent les coûts liés à la guerre en Ukraine. Ce que les dirigeants européens appellent le soutien à l’indépendance de l’Ukraine est en fait une guerre à la Russie, par Ukrainiens interposés. Cette guerre militaire est la suite logique de la guerre économique que les États-Unis et l’Europe mènent au reste du monde, en imposant leurs capitaux, leurs produits, leurs règles et en pillant les ressources des pays moins développés. La guerre a été déclenchée par la Russie mais elle est la conséquence de l’expansionnisme des pays occidentaux vers l’Est. Le gouvernement ukrainien de Zelenski mène la guerre de nos capitalistes contre les capitalistes russes. Il le fait avec le sang des Ukrainiens et les gouvernements européens participent au carnage en finançant l’opération. Cela aussi a vidé les caisses publiques, pour le plus grand bonheur des marchands d’armes et certainement pas pour le bien commun. Là aussi l’État belge, en dignes représentants des intérêts de la grande bourgeoisie, veulent faire payer l’addition aux classes populaires.
À la suite de cette guerre, les ménages populaires ont déjà subi une inflation comme on n’en avait plus connu depuis longtemps, et qui a laissé une marque durable puisque la consommation des ménages est restée basse alors que le prix du gaz, par exemple, est revenu à la normale. Un retour de l’austérité signifierait un recul social supplémentaire. Des services publics nécessaires comme la santé, les transports ou l’éducation deviendraient encore plus squelettiques et les soins de qualité réservés à une élite qui peut se les payer. Le montant des pensions et des allocations sociales sera à nouveau dans la ligne de mire. C’est insupportable.
Les accords de Maastricht ont servi pendant des années comme une arme au service des gouvernements de chaque pays européen contre leur propre population. Pendant des années, ils ont justifié les coupes dans les budgets publics et le blocage des salaires. Cette nouvelle mouture de l’austérité ne vaut pas mieux. Elle est d’autant plus inacceptable que les profits des entreprises n’ont jamais été aussi énormes. L’inflation a directement profité aux actionnaires de la grande distribution, mais ce sont tous les secteurs de l’économie qui ont engrangé des profits. C’est cet argent là qu’il faut prendre ! Il n’y a aucune raison que la dette créée pour le patronat doive être payée par les travailleurs.
Comme toujours, la seule chose qui peut empêcher le gouvernement belge, celui-ci ou le suivant, de passer à l’acte, c’est une mobilisation de l’ensemble du monde du travail. Ensemble, il est possible de bloquer l’économie et de couper la pompe à profits à la source. Le patronat ne comprend que le langage de la force. Notre force, c’est notre nombre, notre unité et notre détermination
Une course aveugle vers la catastrophe
La propagande guerrière bat son plein. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a demandé aux pays membres d’accélérer leur production d’armes jusqu’à obtenir un rythme « de période de conflit ». Le chancelier Allemand, Scholtz, souhaite que l’Europe se lance dans la production de masse de matériel militaire. La ministre belge de la Défense, a appelé toute la population à devenir réserviste. On pourrait ainsi multiplier les exemples de cris d’alarme face à l’intention supposée de la Russie d’attaquer les pays européens.
Dans le même temps, ces politiciens temporisent en assurant que la guerre n’est quand même pas pour demain et que leur premier choix reste la paix. Il n’y a aucune raison de leur faire confiance et, en tout cas, ils préparent les esprits à une prochaine guerre.
L’OTAN n’est pas une alliance de défense mutuelle comme ses dirigeants le prétendent, c’est une coalition militaire qui représente les intérêts des pays les plus puissants qui la composent, en premier lieu les Etats-Unis, mais aussi bien sûr la France, l’Allemagne et la Grande Bretagne. Ces pays, ensemble ou séparément, ont participé à la plupart des conflits militaires récents, en Afghanistan, en Irak, en Syrie. Ils défendent tous le droit d’Israël à massacrer la population palestinienne à Gaza. Ils soutenaient même Poutine quand celui-ci envoyait son armée contre les travailleurs révoltés du Kazakhstan.
Les dirigeants des pays de l’OTAN, comme les autres d’ailleurs, sont prêts à envoyer des bombes sur les peuples de toute la terre si cela peut servir leurs intérêts. En réalité, ils ne défendent pas la liberté ou la démocratie, comme ils le prétendent. Ils défendent uniquement les intérêts financiers des grands groupes capitalistes qui dominent l’économie mondiale et qui ont colonisé économiquement l’ensemble de la planète.
Les conflits actuels ne sont pas le résultat de la volonté de quelques dirigeants fous mais la conséquence de la concurrence généralisée entre grands groupes capitalistes pour le contrôle des marchés des ressources de la planète.
Depuis plus d’un siècle, le capitalisme s’est mondialisé, de grands groupes industriels ont monopolisé la production et contrôlent l’immense majorité des capitaux. La concurrence entre entreprises a fait place à un combat de géants internationaux qui contrôlent toute la chaîne de production, de la mine à l’usine et de l’usine au magasin. Tout a pris des proportions gigantesques, ces groupes disposent de moyens supérieurs à la majorité des pays européens. Ce sont eux qui dictent la politique des États, pas le contraire.
Cependant, les marchés et les ressources ne sont pas infinis. Alors, quand, par exemple, des géants de l’électronique veulent mettre la main sur des mines de Coltan nécessaire à la production des semi-conducteurs, ils entrent en conflit par milices interposées et cela provoque une guerre au Congo. Quand les capitalistes américains et européens veulent agrandir leur marché à l’Est, au détriment des oligarques russes, cela engendre la guerre en Ukraine. Pour maintenir leur contrôle sur le Moyen-Orient, zone pétrolière stratégique, les USA et leurs alliés n’hésitent pas à soutenir les dictatures des pays du golfe et un régime d’apartheid en Palestine.
Tout cela n’est pas nouveau, mais les discours alarmistes des chefs militaires et la propagande antirusse et antichinoise montrent que la concurrence illimitée est en train de prendre une tournure militaire qui rappelle les moments qui ont précédé la Première et la Seconde Guerre mondiale.
Les guerres se font avec le sang des travailleurs et de leurs enfants ; ceux qui les déclenchent ne se retrouvent pas sur le champ de bataille, mais ils ont besoin de faire croire aux populations laborieuses qu’elles vont se faire tuer pour un noble idéal. C’est le rôle des discours nationalistes. Les ouvriers russes et ukrainiens qui se tirent dessus croient chacun défendre leur patrie. En réalité, ils ne défendent que les appétits de profits des richards des deux bords.
A un moment donné, les dirigeants européens tenteront à leur tour d’envoyer les travailleurs sur de nouveaux champs de bataille. Ils font leur beurre sur notre travail, et ils voudraient qu’on s’entretue pour leurs profits !
Il est urgent que les travailleuses et les travailleurs se préparent à ces guerres, pas pour les faire mais pour les empêcher, pour enrayer cette machinerie aveugle, pour changer du tout au tout l’organisation de la société et remplacer l’égoïsme et la folie du profit par l’entraide et le bon sens. Toute l’économie repose sur le monde du travail, il a le poids, la force et le nombre pour y arriver.
Bulletin Stib du 16 février
Ouvriers et paysans, une même misère, un même combat
Après la France, l’Allemagne et l’Italie, le mouvement de colère des agriculteurs a gagné la Belgique. Des files de tracteurs ont bloqué les routes ou l’accès des entrepôts de firmes de la grande distribution.
Ils se plaignent avant tout d’avoir des revenus insuffisants, mais aussi de la complexité des procédures administratives et des dernières réglementations de la commission européenne en matière d’environnement. Autre sujet d’inquiétude : les accords de libre-échange avec les pays d’Amérique du Sud, qui vont aggraver la concurrence sur certains produits agricoles.
Il est vrai qu’un grand nombre de petits exploitants peinent à joindre les deux bouts. Ils sont coincés entre les banques, auxquelles ils ont dû emprunter pour acheter leur matériel, et les intermédiaires de la grande distribution, qui leur imposent les prix les plus bas possibles.
Devant l’ampleur du mouvement, les politiciens se sont empressés de faire des concessions. La commission européenne a accepté de postposer les limitations sur l’utilisation de pesticides. Cela ne lui coûte rien, mais les ouvriers agricoles et les familles populaires qui ne peuvent pas se payer du bio, vont pouvoir continuer à s’empoisonner.
La seule concession qui aura un impact financier est le report de l’obligation de mise en jachère de 4% des surfaces agricoles qui a été repoussée. Or, en pratique, elle ne touche quasiment pas les petits producteurs, et seules les grandes exploitations d’agriculture intensive vont en profiter.
Car dans le monde agricole, il y a les petits, qui doivent travailler beaucoup pour gagner peu ; et il y a les gros, qui dirigent des entreprises de production, de transformation ou de distribution. Ceux-là exportent à l’international, participent à la fixation des prix et ce sont eux qui encaissent la majeure partie des subventions de la politique agricole européenne. La sympathie dont le mouvement paysan peut jouir dans la population leur sert de paravent pour avancer leurs propres revendications : réduire les taxes, augmenter les aides d’État et assouplir les réglementations sociales ou écologiques.
Les petits paysans, ceux qui travaillent eux-mêmes leurs champs ou élèvent eux-mêmes leur bétail, ont le sentiment d’avoir un rôle particulier dans la société : « sans agriculture, pas de nourriture » clament-ils à juste titre. Mais sans les routiers qui transportent leurs produits, il n’y en aurait pas non plus. Et que dire des ouvriers qui fabriquent les tracteurs, des maçons qui construisent les entrepôts ou des employés des centres de distribution ? Du champ à l’assiette, il y a une chaîne infinie de travailleuses et de travailleurs qui sont tous tout autant nécessaires au fonctionnement de l’ensemble de la société.
Les uns comme les autres ont en commun d’être, d’une manière ou d’une autre, des victimes de l’appétit de profits des grands capitalistes. Pour les uns, ce sera un patron qui rogne sur les salaires et met la pression sur les cadences. Pour les agriculteurs, c’est un distributeur qui casse les prix. La difficulté de joindre les deux bouts à la fin du mois est leur lot commun.
Les gouvernements, eux, se moquent bien de toute spécificité du monde agricole : ils œuvrent à maintenir la pyramide capitaliste dont le sommet, les patrons et les actionnaires, s’engraisse aux dépens de la base, les millions de familles populaires qui n’ont que leur travail pour vivre.
Tant que cette pyramide ne sera pas ébranlée, l’exploitation pèsera de tout son poids sur les ouvriers, les employés comme sur les paysans. Des luttes, comme celles des paysans aujourd’hui, redonnent parfois un peu d’oxygène, mais tout ce que les patrons ou les gouvernements doivent céder un jour, ils chercheront à le reprendre dès le lendemain.
Aussi sympathique que nous semble la mobilisation des agriculteurs, elle ne remet pas en cause la logique capitaliste. Même les revendications qui sont portées par les plus petits d’entre eux ne visent qu’à en assouplir quelque peu les règles. Dans l’ensemble, ils continuent à s’inscrire dans la loi du marché, alors même que c’est elle qui les pousse dans la misère.
En revanche, une lutte d’ensemble, ouvriers et paysans, pourrait briser cette loi inique, qui permet à une minorité d’oisifs de vivre du travail des autres. Elle permettrait de mettre en place une société juste, collective, sans crises économiques et sans guerres, et dans laquelle plus personne n’aurait à craindre pour son avenir. Le combat des agriculteurs sera peut-être une étincelle pour initier cette lutte d’ensemble dont nous avons tant besoin
Bulletin Stib du 2 février
Des demandeurs d’asile toujours à la rue
Ce jeudi 11 janvier, un huissier a procédé à une saisie au cabinet de la secrétaire d’état à la migration de Moor (CD&V) condamnée à 9 000 reprises pour non-assistance à des candidats à l’asile. En attendant, des centaines d’entre eux continuent à rejoindre les rangs des sans-abris dont les politiciens font mine de se soucier en ces temps de grands froids. Pas de quoi émouvoir pour autant la secrétaire d’état qui, non contente de continuer à ignorer ses obligations en matière d’accueil, vient de concocter un nouveau code de lois répressives contre les migrants.
La rue c’est la mort
Début janvier, un homme de 40 ans a été retrouvé mort dans une rue d’Ixelles. Il dormait à la rue depuis un certain temps déjà. Suite au grand froid, plusieurs communes ont ouvert des centres d’urgence pour pouvoir héberger les sans-abris pendant quelques nuits. Dès que la température repassera au-dessus de 0 degrés, ils retourneront à la rue affronter le froid, le manque d’hygiène et la violence quotidienne. Que vaut une société qui laisse les plus faibles d’entre nous mourir, sans soins, sur le bord des trottoirs ?
Les impérialistes sévissent en mer Rouge
Dans la nuit des 11-12 janvier, les armées de l’air américaine et britannique ont bombardé le Yémen en représailles aux tirs de missiles opérés par les Houthis contre des navires occidentaux en mer Rouge. Spectateurs complices du massacre à grande échelle opéré par Israël à Gaza, les dirigeants impérialistes ne manquent pas de déployer la grosse artillerie dès que les intérêts de leurs multinationales sont en jeu. Quand ces dirigeants prennent prétexte de l’instabilité régionale, c’est pour mieux faire oublier que leurs politiques ont été les premières à l’alimenter.