Les rêves du patronat sont le cauchemar des travailleurs

On a eu droit aux cadeaux au patronat, sous la forme de réductions d’impôts, dont les fameux « intérêts notionnels » qui créent à eux seuls un manque à gagner de 4 milliards d’euros par an dans le budget de l’État. La N-VA veut aller encore plus loin en réduisant le taux d’imposition des entreprises à 20%.
On a eu droit au report de l’âge de la retraite à 67 ans, soi-disant pour compenser le déficit de la sécurité sociale. Mais le gouvernement se garde bien de mettre en relation ce déficit avec les réductions d’impôts et de charges sociales.
Et on a eu droit au saut d’index, au nom d’emplois qui ne viendront jamais. Car les patrons empochent les réductions mais n’embauchent pas pour autant.
Ce mois-ci, Kris Peeters, le ministre fédéral CD&V de l’emploi a publié ses dix propositions pour rendre le travail plus « faisable ». Un musée des horreurs !
Peeters veut permettre de reporter ses congés afin de les économiser pour plus tard. Il veut mettre les heures supplémentaires au même tarif que les heures normales, voire supprimer carrément le comptage des heures dans certaines professions. Tout cela se ferait sur base « volontaire » mais on sait bien que cela ne veut rien dire face à la peur légitime de perdre son emploi. Côté précarité, Peeters innove avec « l’intérim à durée indéterminée », une manière de rendre la précarité permanente !
Les autres propositions vont dans le même sens : rendre le travail plus flexible et réduire les droits des salariés. Le patronat apprécie. La FEB, le syndicat patronal, trouve même cela insuffisant et propose de supprimer l’ancienneté dans les salaires, sous le faux prétexte de favoriser l’emploi des plus âgés !
Cette réaction patronale est prévisible. Celle des syndicats l’est malheureusement tout autant. FGTB comme CSC ont critiqué uniquement la forme : ce malpoli de Peeters ne leur a pas demandé leur avis. Mais sur le fond, ils se disent prêts à discuter de chacun de ces points !
Et ces mêmes syndicats sont dans le même temps en train de discuter de désamorcer la seule arme dont le monde du travail dispose pour se défendre contre ce genre d’attaques antisociales : le droit de grève.
Les négociations sont en effet en cours entre les centrales et le patronat pour limiter l’usage du droit de grève. Le patronat voudrait d’une manière ou d’une autre interdire les piquets, interdire de bloquer les routes ou les transports publics, bref interdire tout ce qui fait la force d’une grève. Et il voudrait pouvoir poursuivre les délégués en justice en cas de « débordement ».
Il est très grave que les syndicats acceptent même de discuter d’un tel retour en arrière.
Le droit de grève n’a pas toujours existé, ni en Belgique, ni ailleurs. Il a été obtenu par la force de la mobilisation, par des luttes qui ont fait bien des morts dans les rangs ouvriers.
Mais ces luttes sont oubliées. Les syndicats d’un côté, et le parti socialiste de l’autre, ont prétendu que petit à petit le sort des travailleurs allait s’améliorer, élections après élections. Ils ont prétendu qu’il n’était plus nécessaire de se battre et que la négociation était plus efficace que le conflit. Sur le terrain, les syndicats sont opposés à l’action spontanée des travailleurs, opposés aux grèves « sauvages ». Ils se présentent comme des gens « responsables », mais responsables devant qui ? Pas devant les travailleurs en tout cas ! Pendant ce temps, le patronat attaque. Il attaque au niveau des entreprises par les licenciements, par le recours à l’intérim, par l’aggravation des conditions de travail et l’augmentation des cadences. Et il attaque aussi via les gouvernements qui imposent l’austérité à la majorité de la population, qui rognent sur les retraites et pourchassent les travailleurs licenciés, accusés de « profiter » du système. Le patronat n’a jamais cessé d’attaquer.
S’il peut supprimer les horaires de repos, les congés payés et le droit de grève, il le fera, comme il reviendra en arrière sur toutes les concessions qu’il a dû faire par le passé.
La seule manière de l’en empêcher, c’est de lutter, de faire grève contre chaque mesure, de manifester, de bloquer les routes et d’arrêter les trains. Il faut que les patrons aient peur que chaque attaque provoque une réaction qui leur coûte encore plus cher. Faute de quoi, le rêve patronal risque de devenir un cauchemar bien réel pour des millions de familles.

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