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Pour les travailleurs, pas d’avenir sans luttes

Proximus a annoncé en janvier un plan de restructuration qui prévoit 1900 licenciements.
Le prétexte invoqué est de se « préparer aux changements ». Une semaine plus tard à peine, le groupe NLMK annonçait à son tour son intention de licencier 290 personnes aux Forges de Clabecq, soit la moitié du personnel. NLMK voudrait en outre imposer aux travailleurs qui resteraient une flexibilité accrue et un blocage des salaires pendant plusieurs années. Dans les deux cas, l’avenir de l’entreprise sert de prétexte à la restructuration.
Pourtant, ni Proximus, ni NLMK ne sont des entreprises en difficulté. Sept milliards de bénéfices en 2018 pour la première et douze milliards de chiffre d’affaires pour la seconde. Les 240 millions de salaires que Proximus voudrait économiser sont bien inférieurs aux 500 millions payés chaque année aux actionnaires qui, eux, ne produisent rien. La direction a récemment refusé de réduire ces dividendes car cela « ne serait pas bon pour les actions ».
Ce n’est de toute façon pas une question de
chiffres. Les entreprises de cette taille disposent d’experts en montages financiers pour maquiller
les chiffres et escamoter discrètement leurs bénéfices. Quand bien même les bilans comptables afficheraient des pertes, cela n’empêche pas que,
pendant des années, les actionnaires ont empoché les profits créés par le travail des salariés. Et pendant ces années, les directeurs ont été grassement payés pour maximiser ce profit en imposant la polyvalence et la flexibilité, en augmentant les cadences, en rognant sur la sécurité, en réduisant les effectifs et en faisant jouer le chantage à la fermeture pour faire accepter aux travailleurs des baisses de salaires. Mais rien n’y fait, quand les actionnaires trouvent ailleurs de meilleurs rendements financiers, ils lâchent tout pour se jeter sur une nouvelle proie, sans aucun scrupule et sans aucun égard pour ceux qui les ont enrichis par leur labeur.
Alors, cette vieille rengaine patronale selon laquelle il faudrait que les travailleurs se sacrifient pour sauver l’entreprise et l’emploi est un mensonge. Cette chanson est reprise en chœur par les politiciens et les médias pour démoraliser et culpabiliser les salariés licenciés qui souhaiteraient se défendre.
De tous temps, les patrons ont usé et abusé de cet argument. Aux Forges de Clabecq, par exemple, dans les années nonante déjà, les 2000 salariés avaient accepté une baisse « temporaire » de leurs salaires pour préserver l’entreprise et les emplois. Cela n’a pas empêché la mise en faillite de l’usine en 1997, à peine quelques années plus tard.
Lors de la grève qui a suivi la fermeture, les travailleurs de Clabecq ont réussi à mobiliser au-delà de leur propre entreprise. Cela a culminé avec la « marche multicolore pour l’emploi » qui a rassemblé 70 000 travailleurs de toute la Belgique, alors même que les directions syndicales ne soutenaient pas le mouvement. C’est cette extension de la mobilisation qui a contraint la région wallonne à trouver un repreneur, Duferco, à qui elle a offert l’usine sur un plateau pour la relancer et calmer le mouvement social.
Il n’y a pas qu’à Proximus et NLMK où l’on licencie. On pourrait aussi citer Coca-Cola, Nokia, Ikea, New-Look, la Sonaca, etc. Ce sont autant d’attaques mais aussi autant de travailleurs qui auraient intérêt à briser leur isolement et unir leurs mouvements de résistance. Ce n’est pas facile, mais c’est la seule solution. Le mouvement des gilets jaunes et la réussite de la grève du 13 février ont montré qu’il y a bien des travailleurs qui sont prêts à se mobiliser pour défendre leur droit à un salaire décent.
Le patronat possède une armée d’experts pour presser les travailleurs comme des citrons, il peut compter sur les politiciens pour édicter des lois sur mesure pour bloquer les salaires ou les empêcher de se défendre, il dispose de journaux et de télés pour propager son idéologie de soumission aux prétendues lois du marché.
Les travailleurs n’ont rien à attendre de l’État et des politiciens, qu’ils soient de gauche ou de droite. A Clabecq comme à Proximus, le fédéral et la région sont actionnaires mais ils ne font rien pour influencer les décisions car le rôle de l’État est de défendre la logique du profit. Le patronat fait de la politique, il mène sa politique.
Les travailleurs ont un besoin vital de mener eux aussi leur propre politique, de s’organiser pour défendre leur intérêt collectif, au-delà des frontières et des divisions entre entreprises, statuts, langues ou origines. Une mobilisation large permettrait de faire reculer l’ensemble du patronat plutôt que de se défendre entreprise par entreprise. Le camp des travailleurs prendrait alors la mesure de sa force réelle et cela ne pourra que le renforcer pour les luttes futures.

Pour une riposte du monde du travail

2018 a été une année de plus d’attaques répétées contre les classes populaires, d’une misère accrue et de régression sociale.
Le gouvernement et les employeurs, armés de rapports du FMI ou d’universitaires, prétendent aujourd’hui que le pouvoir d’achat a augmenté et que le chômage a baissé. Ce mensonge ne tient pas.
Les travailleurs ne s’y trompent d’ailleurs pas. Les fins de mois sont toujours plus difficiles, il faut toujours plus se serrer la ceinture.
Les prix ont augmenté. Ce n’est pas seulement le coût des carburants qui a décollé mais aussi celui de denrées et de services aussi indispensables que le gaz (+17%), l’électricité (+10%), les soins dentaires (+8%) et des produits alimentaires comme les pommes de terre par exemple (+11%).
Quant aux salaires, ils ont reculé. Entre 2015 et 2017, les salaires réels ont perdu 2,3%. Cela a continué cette année. Les raisons sont à chercher dans le saut d’index et, de façon plus générale, dans le chantage à l’emploi que les patrons font peser sur les travailleurs.
Les statistiques qu’utilisent le gouvernement et les employeurs sont tronquées. Elles intègrent dans leurs moyennes tous les privilégiés qui ne tirent pas leurs revenus de leur travail, contrairement à l’immense majorité de la population.
Pour ce qui est du chômage, il est bien loin de diminuer. Les statistiques officielles de l’ONEM dénombraient 365 000 chômeurs indemnisés au premier semestre 2018, mais il faudrait y ajouter plus de 150 000 chômeurs sans indemnités. C’est en laissant dans l’ombre plus du tiers des sans-emplois que le gouvernement tente de cacher que sa politique ne profite qu’aux riches.
Ainsi, le Tax-shift a permis au patronat de faire des économies de cotisations au détriment de la sécurité sociale tandis que la réduction de l’impôt sur les sociétés a été synonyme de coupes dans les services publics que les classes populaires sont les premières à subir.
Face à ces attaques, il n’a pas toujours été facile pour les travailleurs de s’organiser et de s’unir pour résister efficacement au gouvernement et au patronat.
Dans le secteur public, les fonctionnaires sont entrés plusieurs fois en grève. Cependant, les syndicats ont organisé trop peu de jours d’action pour que le gouvernement se sente menacé.
A la SNCB, plusieurs jours de grève n’ont pas réussi à faire abandonner les projets du gouvernement sur les retraites. A Bpost, une grève de 5 jours contre la détérioration des conditions de travail décidée par les syndicats a amené nombre de travailleurs qui n’avaient jamais fait grève à débrayer. Nombreux sont ceux qui n’ont pas accepté la capitulation syndicale qui a suivi, ont refusé l’accord proposé et continué le mouvement encore plusieurs jours. Chez Ryanair et AviaPartner, les travailleurs en grève ont réussi dans les deux cas à faire plier la direction. De nombreux autres secteurs, dont la distribution avec Carrefour-Mestdagh, ont été touchés par des annonces de vagues de licenciements et les salariés sont aussi entrés en lutte.
Tout cela montre que, quoi que veuillent faire croire les politiciens bourgeois, et malgré les coups et les reculs, le monde du travail peu se mobiliser pour se défendre.
Une preuve de plus en a été donnée à la fin de l’année quand de nombreux travailleurs, encouragés par les gilets jaunes en France, se sont mobilisés contre le gouvernement et la cherté de la vie.
Ce mouvement spontané reste disparate, sans unité, traversé par un mélange d’idées qui reflétait une composition sociale hétéroclite allant des travailleurs salariés aux petits patrons indépendants. Il n’est pas clair qui, des uns ou des autres, donnera le ton.
C’est la classe ouvrière qui fait fonctionner toute l’économie. Elle possède un atout essentiel pour faire plier le patronat : la grève. Les gilets jaunes, en restant à l’écart du mouvement ouvrier, se privent de cette arme essentielle.
Aujourd’hui, les travailleurs ont un besoin vital d’une augmentation générale des salaires, des pensions, des allocations et de l’embauche. Alors, il faut souhaiter que 2019 soit l’année de la riposte du monde du travail !

C’est dans les entreprises que le combat doit se mener

La journée d’action du 14 décembre contre la réforme des pensions et pour l’augmentation du pouvoir d’achat a été un franc succès. Les lignes des TEC en Wallonie et de De Lijn en Flandre étaient quasi totalement à l’arrêt, des zonings ont été bloqués ainsi que des centaines de grandes entreprises, aussi bien dans le secteur de la métallurgie que du textile, avec parfois 100% de grévistes. Des hôpitaux et des écoles se sont joints au mouvement. Des convois ont mené des actions escargot sur les routes tandis que d’autres actions étaient menées sur les ronds-points des centres-villes.
Isolés dans leur bulle, les politiciens et les médias avaient pour unique préoccupation les éternelles bisbilles politiciennes de la N-VA, du MR et des autres. Ils en viennent à considérer comme acquis que les travailleurs accepteront éternellement sans réagir à l’humiliation et aux privations qu’ils leur sont imposées.
L’histoire devraient leur avoir appris qu’ils ne doivent pas compter là-dessus. L’ampleur du mouvement a été bien au-delà des habituels bastions syndicaux. Les syndicats ont eux-mêmes reconnu qu’ils avaient été surpris par la volonté des travailleurs de faire grève.
Il est clair que le mouvement des gilets jaunes des semaines passées a donné envie à d’autres travailleurs d’entrer eux-aussi en lutte. Des grévistes racontent comment, au zoning de Courcelles par exemple, les piquets syndicaux cohabitaient avec ceux des gilets jaunes dans une ambiance fraternelle. Certains gilets rouges ou verts déclaraient d’ailleurs être gilets jaunes les autres jours ! C’est assez logique, car ils sont animés par la même volonté, celle de combattre la pauvreté grandissante des couches populaires.
Tous, travailleurs, chômeurs, pensionnés sont confrontés aux mêmes difficultés. Les fins de mois, les frais scolaires, les soins de santé réservés aux enfants, les privations permanentes, tout cela pèse toujours sur les mêmes. Certaines familles en sont réduites à compter sur l’aide des instituteurs pour nourrir les gamins à l’école. Un tel niveau de pauvreté dans un pays riche comme la Belgique, est une honte.
Le gouvernement Michel, non content de maintenir le blocage des salaires, y a ajouté des sauts d’index et surtout le report de l’âge de la retraite à 67 ans. Tout cela au nom de la dette de l’État, alors que cette dette vient principalement des cadeaux aux entreprises sous la forme de baisses successives des cotisations patronales. On en est au point où, selon les statistiques européennes officielles, la Belgique est le pays de la zone euro où le salaire a le moins augmenté et où les charges patronales ont le plus diminué.
La Belgique est candidate au titre de paradis des patrons et Michel voudrait gagner la course. Que cela provoque la colère des travailleurs est inévitable, la seule incertitude est quand.
L’étincelle des gilets jaunes a probablement aidé à la réussite du mouvement, mais elle n’explique pas tout. Chaque année il y a des grèves et des manifestations auxquelles les travailleurs répondent présents. Si le mouvement des gilets jaunes a pris cette ampleur, c’est justement parce qu’il est en partie composé de travailleurs plus déterminés à agir que leurs propres syndicats et qui ne se reconnaissent pas dans des structures syndicales qui n’organisent pas la lutte pour leurs revendications. Tous les travailleurs le savent et le disent : ce n’est pas en avec une manifestation par an qu’on peut forcer un gouvernement à céder quoi que ce soit.
L’organisation d’un micro rassemblement devant la FEB ce 14 décembre, au lieu d’une vraie manifestation, tout comme l’absence de mot d’ordre de grève à la SNCB, dans l’enseignement et à la Stib, montrent bien que les syndicats n’ont rien vu ou compris de la situation actuelle et en tout cas qu’ils ne sont pas prêts à organiser les grèves nécessaires. Alors, tant mieux si les travailleurs les ont surpris par leur détermination ce vendredi, et tant mieux si certains, en endossant un gilet jaune, ne les ont pas attendus pour agir !
Mais, les gilets jaunes se revendiquent d’être le Peuple et c’est là que le bât blesse. Car il n’y a pas de Peuple, il n’y a que des exploités et des exploiteurs. Le Peuple est un mot fourre-tout qui avait tout son sens au XVIIème siècle à l’époque de la Révolution française lorsqu’il représentait la population opposée à l’aristocratie, parasite au-dessus de la société. Le Peuple, c’est une communauté d’individus, aux intérêts divers voire contradictoires, réunis par leur opposition au pouvoir politique.
Nous ne sommes pas le Peuple, nous sommes la classe des travailleurs, la classe des exploités et nous sommes dans une guerre contre le grand capital, contre la classe des exploiteurs. Que ce soit pour gagner la bataille ou la guerre, il faudra que la lutte se mène dans les entreprises, là où nous sommes une force.

Les travailleurs doivent prendre le contrôle de la société !

Démarré mi-novembre en France, le mouvement des Gilets jaunes a fait tache d’huile en Belgique et il continue malgré le concert de commentaires négatifs dans les médias et la classe politique.
Certes, les uns comme les autres disent comprendre le désarroi social des Gilets jaunes. Mais en pratique, les médias font leurs premières pages sur les dégâts occasionnés lors des manifestations. Les moins négatifs limitent leurs critiques à pointer du doigt l’absence d’organisation et de revendications claires, les autres accusent le mouvement de flirter avec le populisme, voire l’extrême droite.
De l’autre côté, les politiciens renchérissent en dénonçant les débordements inacceptables. Eux aussi reconnaissent du bout des lèvres qu’il y a un problème social à la base du mouvement, mais ils s’abstiennent évidemment de proposer quoi que ce soit de concret pour y répondre. Charles Michel, par exemple, a dit entendre le message – mais il ajoute aussitôt que son Tax Shift va tout résoudre et ensuite que c’est la faute au… changement climatique ! « Il ne faut pas faire croire que l’argent tombe du ciel, quelqu’un doit payer, si ce sont les entreprises, ce sont des emplois potentiels qui sont en jeu ». Tous ceux qui travaillent dur, jour après jour, toute leur vie, apprécieront qu’un ministre qui gagne 10 000 euros par mois leur fasse la morale sur « l’argent qui ne tombe pas du ciel ». Surtout quand il s’acharne à les faire travailler encore plus longtemps et à réduire les impôts de ces bourgeois qui vivent du travail des autres !
Même son de cloche dans les autres partis : tous prétendent avoir entendu le message, se défaussent les uns sur les autres et attendent que la répression policière et la lassitude aient raison du mouvement pour reprendre le train-train des affaires.
Médias et politiciens partagent un point commun à propos des Gilets jaunes : le mépris pour un mouvement qui est parti d’une colère profonde de ceux dont ils attendent qu’ils subissent leur sort en silence.
Il n’y a qu’à voir la manière dont le même Charles Michel et les médias ont encensé la marche pour le climat pour se rendre compte qu’il y a deux poids et deux mesures ! Le dimanche, il n’y avait pas d’autopompes en embuscade, ni de policiers en civil pour arrêter les manifestants à la descente du train…
Il est vrai que le mouvement des gilets jaunes n’est pas homogène et structuré. On y retrouve tant des salariés, des chômeurs ou des pensionnés que des petits indépendants. Beaucoup ont un travail et viennent par solidarité. Tous partagent la difficulté à joindre les deux bouts et ne supportent plus d’être des laissés pour compte, de devoir porter, année après année, tout le poids de l’austérité sans rien recevoir en échange.
Leur première cible sont les taxes et particulièrement celles sur le diesel. Combien de travailleurs dépensent entre 200 et 300 euros par mois pour se rendre à leur travail, parce qu’il n’y a pas de transports publics sur leur trajet, ou à l’heure à laquelle ils vont au travail ? Pour ceux-là, chaque hausse du prix de l’essence les pousse un peu plus vers la précarité et on peut comprendre pourquoi l’augmentation des accises a pu déclencher leur colère. Mais beaucoup vont au-delà et dénoncent plus généralement les salaires trop bas et l’injustice sociale d’une société uniquement tournée vers le profit. Pour d’autres, le problème n’est pas tant de payer des taxes que de ne rien recevoir en retour : pas de profs dans les écoles, ni d’infirmières dans les hôpitaux, pas assez de bus ou de trains.
La colère qu’ils expriment, chacun à leur manière, et la violence qui ressort des manifestations sont le reflet de la violence de la société à l’égard des couches populaires, condamnées à la précarité par l’appétit de profits des capitalistes. Devoir choisir entre nourrir ses enfants ou se soigner, c’est violent, mais c’est pourtant le sort d’un foyer sur cinq en Wallonie et c’est ce que les gouvernants voudraient qu’on accepte en silence, avec leur pitié pour seule consolation.
Le manque de clarté des revendications, parfois contradictoires, reflète le manque d’unité politique. Il n’est pas évident pour tous que c’est le capitalisme qui est responsable de cette situation et que les gouvernements n’en sont que les gestionnaires.
Des voix parmi les Gilets jaunes disent qu’il ne suffira pas d’obtenir un recul sur les taxes. Effectivement, quoiqu’il cède, le gouvernement cherchera aussitôt à le reprendre. Le seul moyen de sortir de ce cercle vicieux, ce serait d’imposer un contrôle de la population sur les comptes de l’État et des grandes entreprises. On verrait alors où va l’argent des impôts ainsi que les milliards créés par notre travail. Et il faudrait aussi imposer une hausse générale des salaires au détriment des profits. Voilà des revendications qui pourraient unir les travailleurs. Et cette union, c’est leur force.

Plus que jamais la lutte des classes

Journalistes et intellectuels peuvent bien clamer que les classes sociales n’existent plus et que la lutte des classes est une histoire ancienne, il suffit d’observer la situation sociale pour se convaincre du contraire.
Warren Buffet, l’une des premières fortunes mondiales n’expliquait-il pas « il y a une guerre des classes, c’est un fait. Mais c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre et qui est en train de la gagner. » La Belgique ne fait pas exception, les conditions d’existence des classes populaires n’arrêtent pas de se dégrader. Depuis quelques semaines, des travailleurs se sont mobilisés chez Ryanair, AviaPartner, Bpost, Mestdagh, etc.
Dans la compagnie irlandaise, les grèves sont fréquentes et un mouvement à l’échelle européenne s’est construit. Suite aux dernières grèves fin octobre, la direction belge s’engageait à faire appliquer la législation locale, plus favorable aux travailleurs et garantissant de meilleures conditions de travail.
Le jour même de la conclusion de l’accord chez Ryanair, ce sont les travailleurs d’Avia Partner qui entraient en grève. Six jours plus tard, la direction a dû céder et passer un accord avec les syndicats. Les travailleurs ont obtenu la transformation de 27 contrats d’intérimaires en CDI, la prolongation de CDD et l’embauche de 40 intérimaires supplémentaires. De plus, alors même que la direction refusait toute intervention pour remédier au matériel défectueux, elle a consenti à débourser 3,2 millions d’euros pour son remplacement.
À BPost, les sous-effectifs et les cadences de travail démentes ont poussé les syndicats à organiser une grève tournante d’une semaine début novembre.
En effet, l’exploitation des travailleurs s’y était fortement aggravée ces dernières années : retour de l’engagement à la journée, chronométrage du tri, allongement des tournées, introduction de nouvelles machines augmentant les cadences, etc. À cette heure, les travailleurs n’ont pas gagné la lutte. Mais ils ont refusé d’accepter l’accord que les syndicats avaient signé avec la direction et les grèves ont continué.
Plus récemment, et sur un mode très différent, des travailleurs manifestent leur opposition à la hausse du prix de l’essence. Les Gilets jaunes comme ils s’appellent, bloquent les routes et les dépôts d’essence. Le mouvement est parti de France et s’est étendu au sud de la Belgique. Mais très vite, les manifestants, pour la plupart des travailleurs, ont exprimé leur ras-le-bol des petits salaires et de ne pouvoir joindre les deux bouts en fin de mois.
Le mouvement s’est organisé à la base, à partir des réseaux sociaux et sans lien avec les syndicats, raison qui explique en partie les réticences syndicales à l’égard des Gilets jaunes. Bodson, le président de la FGTB wallonne, estime aussi que les revendications contre les taxes sont trop partielles, qu’elles ne posent pas le vrai problème des travailleurs, celui des salaires trop bas.
Bodson n’a pas entièrement tort. Les taxes pèsent à la fois sur les travailleurs et sur les petits patrons. C’est la raison pour laquelle les uns et les autres se retrouvent dans le mouvement, sans doute de manière plus importante en France qu’en Belgique. Or, les taxes et les impôts servent de plus en plus à financer les profits des grandes entreprises. Si le gouvernement devait reculer sur les taxes, il se tournerait vers les classes populaires pour les ponctionner un peu plus et combler le manque à gagner pour la grande bourgeoisie.
Des salariés du public ou du privé, des chômeurs et des retraités participant aux blocages ont exprimé qu’ils n’en pouvaient plus des sacrifices et de devoir se serrer la ceinture d’un cran de plus pour se déplacer, ne serait-ce que pour aller au boulot ou pour essayer d’en trouver. Mais, s’ils veulent se battre pour leur droit à l’existence, les travailleurs doivent cibler les donneurs d’ordre : cette classe capitaliste pour laquelle le gouvernement est aux petits soins et qui mène la guerre aux travailleurs.
Aujourd’hui, les manifestants se déclarent apolitiques et par là expriment leur défiance vis-à-vis des partis traditionnels qui mènent tous une politique contre les classes populaires. Mais l’apolitisme est une chimère. Le monde du travail doit mettre en avant ses propres objectifs et se mobiliser sur ses propres revendications.
Pour l’instant on ne peut pas dire quelle direction va prendre ce mouvement. Lorsqu’un ancien membre du parti d’extrême droite de Modrikamen a essayé de lancer un nouveau parti au nom des Gilets jaunes, celui-ci a dû faire marche arrière devant le désaveu exprimé par les portes-paroles du mouvement. Mais hier encore, des militants de Nation, un groupuscule d’extrême droite, ont participé à des blocages.
L’intérêt des travailleurs est de montrer leur indignation sur leur terrain de classe. C’est le meilleur moyen d’empêcher toute récupération par des démagogues.

A quoi servent les élections ?

Les résultats des élections communales ont montré un ras-le-bol général envers la politique des partis qui se partagent le pouvoir depuis des dizaines d’années. Pour le MR, ça a été la douche froide, il se casse la figure un peu partout et n’a plus, par exemple, que deux mayorats à Bruxelles au lieu de six auparavant. Charles Michel a beau crier sur tous les toits que tout va bien en Belgique, il semble que seuls les plus riches sont d’accord avec lui et que les couches populaires, qui ne vivent pas dans les discours mais dans une réalité bien moins dorée, ont marqué clairement par leur vote qu’elles n’étaient pas dupes.
Même s’il n’est pas au gouvernement fédéral, le PS baisse aussi. Il paye sa complicité avec la politique d’austérité et ses magouilles à la région wallonne.
Au sud du pays, la désaffection pour les grands partis a essentiellement profité à Écolo et au PTB. Dans ce dernier cas, il est clair que cela représente une aspiration à une politique plus sociale.
Cependant, l’agitation médiatique a fait place aux négociations discrètes entre les partis pour décider entre eux comment se partager le pouvoir. Et soudain, les ennemis d’hier deviennent les « partenaires » de demain !
L’attention s’est surtout portée sur les négociations entre le PS et le PTB et principalement à Molenbeek, Charleroi et Liège où le PS, majoritaire, a proposé au PTB d’entrer dans une coalition. Les négociations n’ont abouti nulle part et chacun des partis a accusé l’autre de mauvaise foi et de manipulation. Le PS accuse le PTB de ne « pas prendre ses responsabilités » tandis que le PTB accuse le PS de ne pas vouloir suffisamment prendre en compte ses revendications.
Que le PS soit de mauvaise foi dans l’affaire ne surprendra personne. Il compte bien discréditer le PTB soit en le mouillant dans la gestion des affaires et en l’intégrant comme satellite du PS, soit en le faisant passer pour irresponsable. Le PS espère ainsi garder le monopole des voix de la classe ouvrière et continuer à se présenter comme la seule alternative « crédible » aux partis ouvertement pro-patronaux comme le MR.
L’idée d’une alliance des partis de gauche peut paraître séduisante à première vue pour les travailleurs. En réalité, c’est une impasse. Cela revient à imaginer que si des politiciens sincèrement de gauche arrivaient au pouvoir, ils pourraient gérer le capitalisme de façon plus sociale et plus humaine, que le capitalisme deviendrait du coup plus supportable pour les exploités.
Au contraire, toute l’histoire du monde du travail a montré que ce n’était pas possible. Et ce n’est pas par hasard ! Les travailleurs et le patronat ont des intérêts tout à fait opposés : les uns veulent vivre décemment, les autres sont prêts à tout pour augmenter leurs profits, en bloquant les salaires, en esquivant l’impôt, en réduisant les effectifs, en utilisant de la main d’œuvre sous-payée, en trichant, en polluant, tout est bon !
Aucun politicien, même sincère, ne peut s’opposer au rouleau compresseur économique du capitalisme. L’État est de toute façon un rouage du système et les politiciens ne sont pas là pour contrarier le capitalisme mais pour le faire fonctionner.
Il n’y a qu’une manière d’empêcher le patronat de nuire, c’est de lui opposer l’unique force à sa mesure : celle de la grève et des manifestations des travailleurs. Seule une menace sur leurs profits et leur pouvoir peut faire suffisamment peur aux bourgeois pour qu’ils reculent. C’est ce que les salariés de Ryanair et Avia Partner ont montré récemment, à leur échelle bien sûr.
Voilà pourquoi ce front de gauche PS-PTB est une impasse pour le monde du travail. Le PTB, qui connaît très bien l’histoire et qui se prétend du côté des travailleurs, contribue à une énième répétition de la même illusion qui mènera aux mêmes déceptions.
Pour nous communistes, si les élections servent à quelque chose, ce n’est pas à envoyer des représentants des travailleurs dans les institutions bourgeoises. Car ils ne pourront rien changer. Ce n’est pas là que les choses se passent et que s’exerce le vrai pouvoir. Les élections servent à populariser les idées révolutionnaires et à défendre un programme politique pour la classe ouvrière. Elles sont l’occasion pour les travailleurs de se rassembler autour du drapeau de la révolution et de se compter. Et si des militants communistes sont élus, ce n’est pas pour participer à la gestion des affaires mais pour dénoncer les arrière-cours de la société capitaliste et la politique de la bourgeoisie à tous les niveaux de pouvoir.
Oui, pour que les choses changent, il faudra une révolution qui mette en place une société réellement démocratique, débarrassée du capitalisme, où les travailleurs décideront ensemble de tout ce qui les concerne, de l’économie à l’écologie, de l’éducation aux soins de santé et aux loisirs.

L’économie capitaliste, c’est le chaos qui détruit tout

L’affaire des centrales nucléaires belges a mis au premier plan le degré avancé de décrépitude de l’État, qui reflète en réalité la décadence de la société capitaliste dans son ensemble.
Pour rappel, Electrabel a annoncé en septembre que suite à des défauts structurels, six des sept centrales nucléaires seraient à l’arrêt cet hiver. Cela va poser de graves problèmes d’approvisionnement. Certains scénarios évoquent même un arrêt des trains pour économiser l’électricité les jours de grand froid. La pénurie annoncée fait déjà grimper les prix et les déclarations lénifiantes du gouvernement ne vont pas empêcher les ménages populaires de voir leur facture augmenter.
La ministre de l’Énergie, Marghem, s’est déclarée surprise et choquée du manque d’entretien des centrales nucléaires. Belle hypocrisie, car c’est elle qui négocie la prolongation du nucléaire avec Electrabel depuis quatre ans qu’elle est ministre !
La presse et les télés ont dénoncé l’irresponsabilité et l’incapacité du gouvernement. En réalité, le gouvernement est à plat ventre devant le patronat et en particulier devant les intérêts des poids lourds économiques comme Electrabel. L’affaire du retraitement des déchets nucléaires en apporte une preuve de plus : il était prévu qu’une loi garantisse qu’Electrabel supporte le coût de l’enfouissement des déchets nucléaires après la fermeture définitive des centrales en 2025. La loi prévoyait aussi un contrôle strict par une agence publique. Mais la loi n’a pas encore été votée qu’elle a déjà été complètement vidée de son contenu. Il ne fallait pas, paraît-il, exposer le pauvre Electrabel à « l’arbitraire » de l’agence de contrôle. En revanche, pas de problème à exposer la santé de la population à l’appétit de profits du groupe Engie, propriétaire d’Electrabel.
Si aujourd’hui les centrales sont fissurées et si demain les stocks de déchets radioactifs fuient, ce ne seront pas le résultat « d’erreurs » mais d’un laisser-faire généralisé. Les Marghem de demain fustigeront les décisions des Marghem d’aujourd’hui, mais le mal sera fait !
Voilà longtemps qu’on n’attend plus des gouvernements bourgeois, de droite comme de gauche, qu’ils aient une attitude responsable vis-à-vis de la santé de la population. Les scandales sanitaires, de la vache folle à la crise de la dioxine, montrent bien qu’on ne peut faire confiance ni aux patrons sans scrupules, ni à l’État qui les laisse faire.
L’inaction du gouvernement face au problème des centrales nucléaires montre qu’on en est arrivé à un point où les travailleurs ne sont plus les seules victimes. Les entreprises aussi vont subir les coupures d’électricité, de la même manière qu’elles subissent déjà l’inertie du gouvernement face aux problèmes de mobilité ou encore face aux problèmes environnementaux, à la pollution et au réchauffement climatique. Les scientifiques tirent la sonnette d’alarme depuis des années, mais pas question de mettre en péril les profits des producteurs de pétrole ou d’automobiles. Pourtant, les bourgeois n’échappent pas à la pollution et leurs enfants avalent du plastique comme ceux des couches populaires.
Il peut paraître contradictoire qu’un gouvernement au service de la bourgeoisie prenne des mesures qui vont avoir des conséquences négatives pour le fonctionnement de ses entreprises.
Ce paradoxe apparent est la conséquence de la compétition acharnée entre les plus grands groupes capitalistes pour accroître leurs profits. Chacun d’eux tire la couverture à lui, c’est la loi du plus fort, à coups de milliards d’euros, et tant pis pour les plus faibles. Les enjeux économiques sont tels que les capitalistes prennent le risque d’amener l’ensemble de l’économie à une nouvelle crise, comme ils l’ont déjà fait plus d’une fois dans l’histoire, voire même à une guerre. La grande bourgeoisie n’en subit généralement pas les conséquences. Au contraire, une partie d’entre elle en tire même des profits faramineux. Ce sont les travailleurs qui en paieront la facture.
Lorsque l’économie devient un tel champ de bataille, cela n’a pas de sens d’imaginer qu’un gouvernement puisse mener une politique « raisonnable », même s’il le voulait. D’ailleurs, la seule chose que lui demande réellement la bourgeoisie, c’est de maintenir la pression sur le monde du travail.
La solution n’est pas à chercher dans de nouveaux ou de meilleurs politiciens mais dans un changement de société : les travailleurs doivent contrôler l’économie dans tous ses aspects, y compris la production d’énergie. Cela peut paraître lointain, mais c’est notre avenir qui est en jeu : si les bourgeois gardent le pouvoir, ils mèneront la planète à la catastrophe.

Il faut construire un parti révolutionnaire

Depuis plusieurs mois, le battage médiatique concernant les élections a commencé.
Dans leurs tracts et leurs apparitions télévisées, les politiciens professionnels nous font bien des promesses. Pourtant, depuis de nombreuses années, la misère et le chômage augmentent dans les classes populaires et les élections n’y ont jamais rien changé.
Beaucoup de travailleurs, en cette veille d’élections, expriment leur dégoût pour ces partis. Les derniers scandales dans lesquels ils étaient impliqués n’arrangent évidemment pas leur crédibilité. Le PS a été ébranlé par des affaires de corruption et de détournement de fonds. Il y a d’abord eu Publifin, dirigée par Stéphane Moreau, aussi bourgmestre socialiste de Ans, dont des membres percevaient de l’argent des réunions fictives. La même chose est arrivée à Bruxelles-Ville où Mayeur, le bourgmestre, a démissionné après qu’on ait découvert qu’il s’enrichissait sur le dos du CPAS.
Le MR a, lui, été touché par le scandale du Kazakhgate. Il est apparu que De Decker, le bourgmestre d’Uccle, avait reçu un pot-de-vin de 700 000 euros, pour faire voter une loi qui permettait à l’homme d’affaires kazakh Patokh Chodiev d’échapper à la justice.
Il est nécessaire de dénoncer les partis qui proposent les vieilles recettes électoralistes
Le MR a traditionnellement son électorat parmi les plus riches et défend les intérêts de la bourgeoisie, au pouvoir comme dans l’opposition. Le PS, contrairement à ce qu’il prétend, a, une fois aux affaires, la même politique anti-ouvrière.
La NVA aussi est ouvertement un parti de la bourgeoisie. Mais elle a un vieux fonds de commerce raciste et xénophobe et mène tambour battant la chasse aux migrants. Elle tient des propos tellement violents que, même au MR, certains finissent par avaler de travers. On savait déjà que des membres dirigeants de la NVA, dont Francken, avaient fréquenté des groupes néo-nazis dans le passé. Récemment, la VRT a montré́ dans un documentaire qu’il existe toujours des accointances entre la NVA et des groupes d’extrême-droite admirateurs d’Hitler.
Rien d’étonnant à ce que voter pour le PTB apparaisse comme une bonne alternative aux yeux de nombreux travailleurs.
Ils croient qu’une victoire du PTB aux élections signifierait des changements significatifs dans les communes et l’arrivée de nombreuses mesures sociales.
Le PTB, anciennement communiste, joue la carte de l’électoralisme. Il entretient l’illusion qu’en allant au pouvoir il pourrait imposer des réformes favorables aux travailleurs. Or, toutes les réformes ont été le fruit des concessions que la bourgeoisie apeurée a faites devant les travailleurs en lutte. C’est lorsqu’elle a eu peur pour sa peau que la bourgeoisie a lâché la journée des huit heures. Il n’en a jamais été autrement. Prétendre le contraire est criminel, car cela conduit à l’échec et à plus de démoralisation.
En Espagne, la participation au pouvoir de Podemos, un parti semblable au PTB, n’a rien changé aux conditions de vie des travailleurs. Pire, lorsque Syriza, son équivalent grec, est arrivé́ au pouvoir, il a usé de la confiance que les travailleurs avaient mise en lui, afin de leur faire accepter des mesures d’austérité. La désillusion a été cruelle et la démoralisation abyssale.
Il est nécessaire de dénoncer les partis qui s’adressent à la classe ouvrière en lui proposant les mêmes vieilles recettes électoralistes remises au goût du jour.
Alors oui, il y a urgence à imposer des mesures contre la misère. Et pour cela, il y a urgence que les travailleurs soient armés politiquement contre toutes ces illusions. Seul un parti révolutionnaire peut mener cette tâche à bien et ce parti, il reste à le construire.
La seule chose à laquelle puissent servir les élections est de compter combien nous sommes à partager ces idées révolutionnaires. En l’absence d’un parti communiste révolutionnaire se présentant aux élections, nous ne donnons pas de consigne de vote. Nous ne voulons pas contribuer aux désillusions à venir.
Nous appelons toujours à la construction d’un parti révolutionnaire des travailleurs qui aurait pour but la constitution d’une société débarrassée du capitalisme et de l’exploitation de l’homme par l’homme.

L’extrême droite et le racisme sont un poison pour les travailleurs

La VRT a diffusé début septembre un reportage sur un groupuscule flamand d’extrême droite « Schild & Vrienden » (Bouclier et Amis) qui diffuse sur Internet de la propagande raciste et sexiste et qui parle de se tenir « prêt au combat » pour la « guerre des races » à venir et déclare : « les grosses femmes sont dégoûtantes ». Ce groupe entretient des liens avec la N-VA et en particulier avec Théo Francken dont ses membres ont assuré le service de sécurité. Plusieurs d’entre eux se présentaient sur les listes électorales de la N-VA, même si depuis le reportage, ils ont « démissionné ». Les caciques du parti ont juré n’en avoir rien su et Francken à dit à la télé qu’il était contre « les racistes qui sont des idiots et des malades mentaux ». Mais personne ne croît à ses démentis qui font suite à plus de quatre ans de discours et de pratiques anti-immigrés à son poste de secrétaire d’État. Quatre ans pendant lesquels il a tweeté ses records d’expulsions et s’est vanté d’enfermer des familles avec enfants dans des centres fermés.
La classe politique, les intellectuels de tous bords et les médias se sont offusqués. Ils accusent certains politiciens de légitimer ces idées et de favoriser leur influence dans la société en s’appuyant sur les sentiments xénophobes, sur la peur et la haine pour arriver au pouvoir, ce qui n’est pas faux. Le laisser-faire de certains politiciens ou leurs accointances avec l’extrême-droite du hongrois Victor Orban ou de l’italien Salvini encouragent les groupuscules d’extrême droite à s’exprimer de plus en plus ouvertement. Francken au gouvernement a dû donner des ailes à ses petits copains de Schild & Vrienden, comme la présence de Salvini au gouvernement italien a pu faciliter le passage à l’acte de fascistes italiens qui ont attaqué des migrants. Mais ce qui serait stupide, ce serait de croire que les politiciens qui flirtent avec l’extrême-droite pourraient s’amender et adopter un discours plus respectueux des droits humains s’ils « comprenaient » les conséquences de leurs discours.
Ce que les médias ne disent pas c’est que ces idées nauséabondes font partie du fonds de commerce de la bourgeoisie ; c’est un des outils qui lui servent à détourner la colère de la classe ouvrière de ses vrais ennemis, les capitalistes. Au 19ème siècle, Marx disait « la religion c’est l’opium du peuple ». Ce qu’il voulait dire par là c’est que, dans la société capitaliste, elle est devenue un outil qui sert à la bourgeoisie pour détourner les travailleurs de toute idée de révolte contre leurs exploiteurs.
Eh bien, le racisme, le nationalisme, les fanatismes religieux, quel que soit le livre dont ils se réclament, ont exactement la même fonction. Ce sont des poisons qui affaiblissent les travailleurs et les anesthésient ; ce sont des idéologies réactionnaires qui se substituent dans les consciences aux idées communistes et à la perspective révolutionnaire de changer la société.
Ces idées nauséabondes ne sont pas neuves, elles suintent de cette société capitaliste et survivent dans ses bas-fonds, entretenues par des bandes de nervis, de jeunes bourgeois catholiques qui rêvent de grandeur militaire et sont prêts à tout pour avoir l’illusion d’exister.
Tandis que la population mondiale s’enfonce depuis des dizaines d’années dans les crises économiques à répétition, les riches continuent à s’enrichir. Les politiciens qui dressent les travailleurs les uns contre les autres sur base de la race ou de la religion servent les intérêts du grand patronat. Ce ne sont pas les migrants qui licencient, qui restructurent ou qui délocalisent, ce sont les patrons ! Mais en les prenant comme boucs émissaires, ils affaiblissent l’unité des travailleurs et les détournent de la cause réelle de leurs problèmes.
Évidemment, les De Wever, les Orban, les Salvini ou les Le Pen prétendent défendre les « travailleurs nationaux », mais en réalité ils défendent d’abord les patrons. Tout comme leur idole, Trump, qui attaque les élites en paroles et qui a fait voter la réforme fiscale la plus scandaleusement pro-riche de l’histoire des États-Unis tandis qu’il cherche à supprimer l’assurance maladie pour la majorité des travailleurs !
Contre eux, le monde du travail ne peut rien attendre des partis « traditionnels » ni de leurs chipotages électoraux car ceux-ci défendent eux aussi l’intérêt du patronat et se contenteront de discours moralisateurs.
Pour se débarrasser de leur ennemi mortel que constitue l’extrême droite, les travailleurs n’ont d’autres moyens que leur lutte, jusqu’à l’éradication du capitalisme et de l’injustice sociale.

Frontières fermées, migrants refoulés : s’opposer à la barbarie du capitalisme

Après l’Aquarius, le Lifeline, navire d’une ONG allemande, est à son tour bloqué en mer avec 230 migrants qu’il a secourus au large de la Libye. Les gouvernements italien et maltais refusent de le laisser accoster. La Belgique accepte de recevoir 15 personnes maximum, mais uniquement ceux avec un « haut potentiel de reconnaissance » dixit Francken, c’estàdire ceux qui seront reconnus comme demandeurs d’asile. On assiste de nouveau à cette situation insupportable où des femmes, des hommes et des enfants, après avoir traversé l’enfer, sont coincés aux portes de l’Europe.
En Italie, le ministre de l’Intérieur d’extrême droite, Salvini, utilise les migrants pour faire une démonstration de fermeté. Non sans ajouter des propositions dignes des lois raciales du régime fasciste de Mussolini, comme celle de ficher les Roms.
Les demandeurs d’asile errent de campements provisoires en centres d’accueil saturés. Francken dit qu’il faudrait pouvoir refouler les bateaux de migrants et contourner l’article 3 de la déclaration des droits de l’homme qui interdit le refoulement des navires. Pour lui, les ONG qui secourent les migrants en Méditerranée font du trafic d’êtres humains et aident la mafia. S’il s’est vaguement rétracté, la justice l’a bien compris et emboîte le pas : quatre personnes, dont deux journalistes sont poursuivies pour avoir aidé et hébergé des migrants du parc Maximilien.
Les dirigeants européens n’ont que le mot « solidarité » à la bouche. Une solidarité à l’image de la société qu’ils défendent ! C’est une série de calculs sordides, pour accorder l’asile à un minimum de migrants et en refouler le plus grand nombre, pour les parquer le plus loin possible de cette Europe des riches. Quitte à ce que la pauvreté s’ajoute à la pauvreté, comme au Niger, vers lequel des dizaines de milliers de migrants sont reconduits, ou au Liban, dont un habitant sur six est un réfugié.
Depuis des années, l’Europe soustraite le rôle de gardes-frontières à des dictateurs et des bandes armées, au Soudan ou en Libye ! Ils y subventionnent l’implantation de camps où les migrants sont soumis à la torture, au viol, à l’esclavage. Du coup, la proposition récente de construire des camps de triage des migrants en Europe, dans les pays où ils arrivent, passerait presque pour humanitaire !
Le sort réservé aux migrants illustre la barbarie de cette société capitaliste. L’écrivain Roberto Saviano a écrit que d’ici un siècle, devant les centaines de corps au fond de la mer, on se demandera « quelle guerre s’est jouée là ? ».
Une partie des migrants qui perdent la vie dans ces traversées fuient effectivement des massacres derrière lesquels on retrouve la main des grandes puissances. D’autres fuient la misère. Et les dirigeants des pays riches osent justifier un tri entre les migrants qui ne veulent pas mourir sous leurs bombes et ceux qui refusent la misère que leur domination provoque !
Le capitalisme, c’est la guerre permanente, y compris sur le terrain économique, comme le rappelle la guerre commerciale que se livrent aujourd’hui les pays les plus développés. La concurrence exacerbée sur un marché rétréci entraîne des tentations protectionnistes, qui sont présentées faussement aux travailleurs comme un moyen de protéger leurs intérêts. Mais le protectionnisme attise une concurrence dont ils sont toujours victimes. Les taxes aux frontières se répercutent sur les prix des marchandises et c’est la double peine pour le monde du travail ! Car on paie en tant que consommateurs et en tant que travailleurs, sommés d’être plus « compétitifs » pour faire face à la concurrence.
La guerre des capitalistes entre eux se fait sur l’exploitation des travailleurs et sur la peau de l’immense majorité de la population. Ne nous laissons pas entraîner dans une logique qui veut opposer entre elles les victimes de cette société folle !